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yeux, quand ils lisent, l’Ancien Testament, car ce voile ne s’ôte que par Jésus-Christ (14) ». Voici ce que l’apôtre veut établir. Ce voile dont Moïse couvrit une fois son visage, ce même voile est perpétuellement étendu sur la Loi. L’apôtre ne prétend donc point déprécier la toi ancienne, ni Moïse dont le visage était voilé, mais seulement faire des reproches aux Juifs ingrats : La Loi brille d’une gloire qui lui est propre ; mais, les Juifs n’ont, pu, la contempler. Qu’y a-t-il donc dé surprenant, dit-il ; s’ils ne peuvent voir cette gloire de la grâce, quand ils n’ont pas même vu la gloire plus faible de Moïse, ni pu contempler son visage ? Pourquoi vous troubler de voir les Juifs refuser de croire en Jésus-Christ, puisqu’ils ne erraient pas même à leur Loi ? S’ils n’ont point connu la grâce, c’est précisément parce qu’ils n’ont connu ni l’Ancien Testament, ni sa gloire. Car la gloire de la Loi, c’est de convertir à Jésus-Christ.
3. Voyez-vous comme l’apôtre confond l’orgueil des Juifs. Ils mettaient leur gloire dans cet éclat du visage de Moïse ; et c’est par là que saint Paul leur démontre leur grossièreté et leur bassesse. Qu’ils cessent donc de s’en glorifier ! Que leur importe cet éclat, puisqu’ils ne purent en jouir ? Il insiste en leur disant que le voile demeure étendu devant leurs yeux, quand ils lisent l’Ancien Testament, et qu’il ne saurait être levé que par Jésus-Christ. Bien plus, quand ils lisent les livres de Moïse, ce voile est sur leur cœur ; et ainsi il est à la fois devant leurs yeux et devant leurs cœurs. Plus haut il disait : « En sorte que les fils d’Israël ne pouvaient contempler le visage de Moïse, à cause de l’éclat dont il resplendissait, lequel éclat a cessé », Et quoi de plus dégradant qu’une telle faiblesse ? Ils ne peuvent fixer leurs regards sur une gloire qui s’évanouit, sur une gloire qui n’est rien en comparaison de la gloire de l’Évangile ; un voile la leur cache, de manière qu’ils n’aperçoivent pas la fin de ce qui finit, c’est-à-dire de la foi qui a disparu. « Mais leur intelligence a été obscurcie ». Et quel rapport entre ces paroles, et le voile de Moïse ? C’est que ce voile figurait l’avenir. Ils n’aperçurent pas, l’éclat du visage ; maintenant ils ne comprennent pas la Loi. Et c’est leur faute : l’obscurcissement de l’intelligence est le signe de la paressé et dé la lâcheté. C’est nous au contraire qui connaissons la Loi : le voile leur cache non seulement la grâce, mais la Loi elle-même.
« Jusqu’à ce jour le même voile demeure devant eux, quand ils lisent l’Ancien Testament, et ce voile ne s’ôte que par Jésus-Christ ». Voici le sens de ces paroles. Ils ne peuvent voir que la fin de la Loi est venue, parce qu’ils ne croient pas au Christ. C’est le Christ qui a mis fin à la Loi, comme la, Loi elle-même le dit : Comment donc les Juifs qui ne reçoivent pas le Christ qui a fait disparaître la Loi, pourraient-ils voir que la. Loi n’existe plus ? S’ils ne le peuvent voir, n’est-il pas manifeste qu’ils ne connaissent point non plus la force et la gloire de la Loi ? Et me demandez-vous, où la Loi dit-elle qu’elle est abolie parle Christ ? non seulement elle le dit, mais elle le montre par les faits eux-mêmes. N’a-t-elle pas renfermé dans un seul lieu tous les sacrifices et tous les rites sacrés, et le temple n’a-t-il pas été renversé ? Si elle n’avait pas voulu que les sacrifices avec tout ce qui s’y rapporte, cessassent un jour d’exister, de deux choses l’une, ou bien elle n’aurait point, détruit le temple, ou bien si le temple eût été détruit, elle n’aurait point défendu de sacrifier ailleurs.
Mais il est défendu de sacrifier en aucun lieu dé l’univers, pas même à Jérusalem ; le temple seul est le lieu dès sacrifices ; et le voilà détruit. Les faits eux-mêmes ont donc montré que le Christ a mis fin aux rites de la Loi. C’est le Christ en effet qui a fait disparaître le temple. Voulez-vous maintenant en être, convaincus par les paroles mêmes de la Loi, écoutez le Législateur lui-même : « Du milieu de vos frères Dieu vous suscitera un prophète semblable à moi ; vous lui obéirez en tout ce qu’il vous commandera. Et toute âme qui n’écoutera point ce prophète ; sera exterminée ». (Deut. 18,18-19) Voyez-vous comment la Loi montre que le Christ la fera disparaître ? Ce prophète, c’est-à-dire, le Christ Dieu incarné, le Christ que Moïse ordonne d’écouter, a fait cesser le sabbat, la circoncision et toutes tes autres cérémonies légales. David exprime la même pensée, quand il dit du Christ : « Tu es prêtre éternellement selon l’ordre de Melchisédech » (Ps. 109,4), et non pas selon l’ordre d’Aaron. C’est cette parole que saint Paul interprète avec la plus grande clarté en ces termes : « Le sacerdoce ayant été transféré, il est nécessaire que la Loi soit elle-