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des anciens jours le démontre. Loth était juste, mais non autant qu’Abraham ; Ezéchias aussi, mais non autant que David ; et de même, pour tous les prophètes, mais ils ne l’étaient pas comme Jean.
Où sont-ils, quand la justice de Dieu est si exacte, ceux qui ne veulent pas qu’il existe une géhenne ? S’il est vrai que tous les justes ne doivent pas jouir des mêmes récompenses, si faible que soit la supériorité des uns sur les autres (car l’étoile, dit l’apôtre, diffère de l’étoile, en éclat), comment les pécheurs jouiront-ils des mêmes biens que les justes ? Un homme ne donnerait pas les mains à cette confusion, et Dieu la ferait ? Voulez-vous que je vous montre, à propos des pécheurs qui ont paru dans le monde, par les faits accomplis, la diversité des traitements, l’exactitude rigoureuse de la justice ? Voyez : Adam a péché ; Eve aussi a péché ; tous les deux ont enfreint la loi, mais il n’y a pas eu d’égalité dans leurs péchés ; et, par conséquent, il n’y a pas eu d’égalité dans leurs châtiments. La différence a été si grande que Paul a pu dire : « Adam n’a point été séduit, mais la femme ayant été séduite, est tombée dans la désobéissance ». (1Tim. 2,14) Assurément ils ont été tous les deux égarés par le fait d’une seule et même séduction, toutefois l’exactitude du jugement de Dieu a fait voir toute cette différence que Paul a exprimée. Autre exemple : le châtiment de Caïn ; après lui, Lamech fut aussi un meurtrier, et cependant il n’a pas eu le sort de Caïn ; pourtant il y avait bien, d’une part, un meurtre, et d’autre part, un meurtre ; et Lamech était de beaucoup plus coupable, puisque l’exemple n’avait pas servi à l’amender ; mais, comme il n’avait ni méprisé les avertissements, ni tué son frère, ni attendu qu’on l’accusât, ni répondu avec impudence aux questions de Dieu, comme il avait prévenu toute accusation, pour se dénoncer lui-même, pour se condamner, il obtint son pardon ; la conduite tout opposée de Caïn lui attira son châtiment. Voyez avec quelle exactitude rigoureuse Dieu pèse les actions. De là encore la diversité des vengeances ; dans le déluge et dans l’incendie de Sodome, la diversité des châtiments contre les Israélites, dans la captivité de Babylone, et sous la domination d’Antiochus ; preuve de l’exactitude des jugements de Dieu sur nous. D’une part, servitude de soixante-dix ans ; d’autre part, servitude de quatre cents ans ; ils mangèrent leurs enfants, ils furent enveloppés dans mille autres innombrables calamités, qui ne suffirent pas cependant à les affranchir envers Dieu, ni ce peuple, ni ceux qui furent brûlés vifs à Sodome. Car, dit le Seigneur : « Au jour du jugement Sodome et Gomorrhe seront traités moins rigoureusement que cette ville ». (Mt. 10,15) Si Dieu ne prenait aucun souci ni de nos fautes, ni de nos bonnes œuvres, il y aurait peut-être quelque raison de dire que le châtiment n’existe pas ; mais quand on le voit, d’un soin si jaloux, prévenir nos péchés, tout faire et de si grandes choses pour nous porter aux bonnes œuvres, il est manifeste qu’il punit les pécheurs et qu’il couronne ceux qui font le bien. Mais voyez donc un peu jusqu’où va la contradiction dans les jugements des hommes. Ils accusent tant de preuves qu’il donne de sa patience ; ou répète que Dieu ne frit pas attention à la foule des pervers, des fornicateurs, des hommes de violence qu’il laisse impunis ; et maintenant, Dieu fait-il des menaces, les mêmes voix s’emportent en accusations amères, acharnées. Cependant, si vous détestez les forfaits, vous devriez approuver, glorifier l’expiation. Mais, ô délire, ô raison à rebours, et digne des ânes ! O cœur ami du péché, ami de la volupté, ô pensée qui n’a de regards que pour la corruption ! Oui, c’est l’amour de la volupté qui engendre toutes ces opinions, et cela est si vrai qu’il suffirait à ceux qui tiennent ces discours, d’embrasser la vertu, pour être bien vite persuadés de la réalité de la géhenne, pour n’en pas douter.
Mais où donc, dira-t-on, en quel lieu se trouvera-t-elle, cette géhenne ? Que vous importe ? La question c’est : il y a une géhenne, et la question n’est pas : où est-elle, dans quel lieu. Quelques-uns content qu’elle sera dans la vallée de Josaphat ; des indications de lieux ont été données au sujet d’une guerre des temps passés ; on les applique bon gré mal gré à la géhenne. Mais dans quel lieu, réplique-t-on, sera-t-elle ? En dehors, je ne sais où ; en dehors, j’imagine, de tout cet univers. De même que les cachots et les mines des rois sont loin de tous les regards, de même, c’est en dehors de cette terre habitée que sera la géhenne.
5. Donc ne nous occupons pas de chercher oui elle est, mais comment nous pourrons l’éviter :