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indiquer tout le crime des Juifs, il dit : « A ce peuple incrédule et contredisant ».
3. Voyez-vous quelle grave accusation ? Ils n’ont point obéi à l’appel de Dieu, mais ils l’ont contredit non pas une fois, ni deux, ni trois, mais tant qu’ils ont vu Dieu le faire ; et d’autres qui ne connaissaient point – e Dieu ont pu se l’attirer. Paul ne dit pas qu’ils ont pu se l’attirer, mais pour ne pas donner d’orgueil aux gentils, et montrer que la grâce divine a tout fait, il dit : « Je me suis montré », et : « J’ai été trouvé ». Donc, direz-vous, les gentils sont donc sans mérite ? Erreur ; ils ont su saisir ce qu’ils ont trouvé, reconnaître ce qui s’est montré, voilà leur part. Et pour que les Juifs ne disent pas Pourquoi ne s’est-il pas montré à nous ? Dieu leur répond par quelque chose de plus : non seulement je me suis montré, mais j’ai attendu, les mains tendues, exhortant, déployant la sollicitude d’un père aimant, d’gne mère tendre. Voyez quelle solution claire et nette Paul a donné à toutes les difficultés proposées plus haut, en montrant aux Juifs que leur perte est le résultat de leur volonté et qu’ils sont absolument indignes de pardon. En effet, bien qu’ils eussent entendu et compris ce qui leur avait été dit, ils ne voulurent point se rendre. Bien plus : non seulement Dieu avait eu soin de leur faire tout entendre et tout comprendre ; mais il y avait ajouté ce qui était le plus propre à les exciter, à attirer des hommes amis de la contention et de la contradiction. Qu’était-ce donc ? Il les avait piqués au vif, il avait éveillé leur jalousie. Vous connaissez la force de cette passion, la vertu de la jalousie pour terminer toute discussion et relever les défaillances. Et à quoi bon parler des hommes, quand nous en voyons l’effet même chez les animaux et chez les enfants de l’âge le plus tendre ? En effet, souvent le petit enfant ne cède pas aux invitations de son père et montre de l’obstination ; mais quand il en voit caresser un autre, il revient, sans être invité, au sein paternel, et la jalousie produit ce que n’avait pu faire une simple exhortation. Ainsi Dieu a agi non seulement il a exhorté, tendu les mains ; mais il a aussi éveillé en eux le sentiment de la jalousie, en appelant des peuples qui leur étaient bien inférieurs (ce qui est le plus sûr moyen de rendre jaloux), en les appelant, dis-je, non à jouir de leurs avantages, mais chose plus grave et plus irritante, à posséder des biens beaucoup plus considérables et plus nécessaires, et tels que les Juifs eux-mêmes n’eussent jamais osé les rêver. Et pourtant ils ne se sont pas rendus. Comment donc seraient-ils excusables d’avoir montré une telle obstination ? C’est impossible. Toutefois Paul ne dit pas cela expressément ; mais il laisse à la conscience de ses auditeurs le soin de tirer cette conséquence de tout ce qu’il vient de dire, et il continue à donner la preuve avec sa sagesse accoutumée.
En effet, comme précédemment, il a présenté des objections sur la loi et sur le peuple, objections renfermant l’accusation la plus grave ; et qu’ensuite dans la solution destinée à réfuter cette accusation, il a fait toutes les concessions qu’il a voulu et que le sujet comportait, de peur que son langage ne parût blessant ; ainsi fait-il encore ici, en écrivant : « Je dis donc : Est-ce que Dieu a rejeté son peuple, qu’il a connu dans sa prescience ? « Loin de là (9, 1) ». Il a l’air d’un homme embarrassé ; comme s’il prenait son début dans ce qu’il vient de dire, il pose une question effrayante ; puis il la détruit et dispose par là â accepter ce qui va suivre, et prouve encore ici ce qu’il avait pour but de démontrer dans tout ce qui précède. Qu’est-ce donc ? Que la promesse subsiste, malgré le petit nombre de ceux qui sont sauvés. C’est pourquoi il ne dit pas simplement « Son peuple », mais il ajoute « Qu’il a connu dans sa prescience ». Ensuite il donne la preuve que Dieu n’avait point rejeté son peuple. « Car », dit-il, « moi-même je suis israélite, de la race d’Abraham, de la tribu de Benjamin ». Moi, le docteur, moi le prédicateur. Et comme cela semblait contredire ce qui a été dit plus haut, à savoir : « Qui a cru à ce qu’il a ouï de nous ? » et encore : « Tous les jours j’ai tendu les mains à ce peuple incrédule et contredisant » ; et aussi : « Je vous rendrai jaloux d’un peuple qui n’en est pas un » : il ne se contente pas de nier et de dire : « Loin de là » ; mais il y revient une seconde fois en disant : « Dieu n’a pas rejeté son peuple (2) ». Mais direz-vous, c’est là une affirmation et non une preuve. Voyez donc la première preuve et celle qui suit. La première, c’est qu’il était juif ; or, si Dieu eût rejeté son peuple, ce n’est pas chez lui qu’il aurait choisi l’homme à qui confier toute la prédication, les intérêts du monde entier, tous les mystères, toute l’administration. Voilà d’abord