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le Christ aussi bien qu’il avait servile démon, Paul démontre son assertion et la rend croyable par ce qu’il dit ensuite, en rappelant ce genre d’esclavage, et comment ils l’ont subi : « Car », leur dit-il, « lorsque vous étiez esclaves du péché, vous étiez libres à l’égard de la justice (20) ».
C’est-à-dire, quand vous viviez dans la malice, dans l’impiété, dans des maux extrêmes, vous montriez une telle docilité que vous ne faisiez absolument rien de bien : car c’est ce que signifient ces mots : « Vous étiez libres à l’égard de la justice » ; c’est-à-dire : vous ne lui étiez point soumis, vous lui étiez totalement étrangers. Vous ne partagiez point votre service entre la justice et le péché, mais vous vous livriez entièrement au mal. Donc maintenant que vous êtes passés à la justice, donnez-vous tout entiers à la vertu, ne faites absolument plus de mal, afin que la mesure soit égale de part et d’autre. Or non seulement il y a une grande différence entre les deux maîtres ; mais il y en a aussi une grande entre les deux services : ce que l’apôtre démontre jusqu’à l’évidence, en faisant voir en quoi ils obéissaient alors, et en quoi ils obéissent maintenant il ne parle point encore du dommage qui en est résulté ; il ne mentionne que la honte. « Quel fruit avez-vous donc tiré alors des choses dont vous rougissez maintenant (21) ? »
Tel était cet esclavage que son seul souvenir fait encore monter la honte au front. Or, si le souvenir fait rougir, à plus forte raison la pratique. Vous avez donc obtenu un double avantage ; vous êtes affranchis de la honte et vous savez en quel état vous étiez ; tout comme vous éprouviez alors un double dommage vous commettiez des actions honteuses et (chose pire encore) vous ne saviez pas même en rougir ; ainsi vous restiez dans l’esclavage. Après avoir prouvé surabondamment, par la honte même qui leur en revient, le dommage que leur a causé leur conduite passée, il en vient au fond même de la question. Quel est-il ? « Car leur fin, c’était la mort ». Comme la honte ne paraît pas être un poids insupportable, il aborde le côté terrible, la mort, veux-je dire ; quoique ce qu’il a dit plus haut, eût dû suffire. Songez à quel point le mal était porté ; puisque, affranchis du châtiment, ils ne l’étaient point de la honte. Quelle récompense, leur dit-il, attendez-vous donc d’une conduite dont le seul souvenir, même quand vous êtes délivrés du châtiment, vous couvre encore de confusion et de honte, bien que vous soyez établis dans urne telle abondance de grâces ? Il n’en est pas ainsi du service du Dieu. « Mais maintenant, affranchis du péché et faits esclaves de Dieu, vous en avez pour fruit la sanctification, et pour fin la vie éternelle ». Le fruit de votre premier état est la honte, même après la délivrance ; le fruit du second est la sanctification ; or, où est la sanctification, là règne une grande liberté. La fin de l’un est la mort ; celle de l’autre, la vie éternelle.
2. Voyez-vous comme il montre les biens déjà accordés et les biens à espérer ? Par ceux-là il confirme ceux-ci ; par la sanctification, la vie. Et pour que vous ne disiez pas que tout est en espérance, il vous fait voir que vous avez déjà recueilli des fruits : d’abord d’être délivrés de ta malice et de tant d’autres maux dont le seul souvenir vous cause encore de la honte ; secondement d’être devenus esclaves de la justice ; troisièmement de jouir de la sanctification ; quatrièmement de posséder la vie, non pas une vie passagère, mais éternelle. Les choses étant ainsi, leur dit-il, fournissez au moins un service égal au premier. Bien que le maître soit infiniment supérieur, malgré la différence qui sépare les deux services et leurs résultats, je ne vous en demande cependant pas davantage. Puis comme il leur a parlé d’armes et de roi, il insiste sur la métaphore, en disant : « Car la solde du péché c’est la mort, mais la grâce de Dieu est la vie éternelle, dans le Christ Jésus Notre-Seigneur (23) ». Après avoir dit la solde du péché, il sort de cet ordre d’idées pour parler du bien. En effet, il ne dit pas : La récompense de vos bonnes œuvres, mais : « La grâce de Dieu », pour leur faire voir qu’ils n’ont point été délivrés par eux-mêmes, ni en acquit de dettes, ni pour récompense ou pour salaire de leurs travaux, mais que tout cela a été l’effet de la grâce. Ainsi ce qui fait l’excellence du don, ce n’est pas seulement que Dieu les ait délivrés, les ait fait passer à une situation meilleure, mais c’est que cela ait eu lieu sans aucune peine, sans aucun mérite de leur part ; c’est que non seulement il les ait délivrés et leur ait accordé des avantages bien plus considérables, mais qu’il les ait accordés par son Fils. Il introduit toutes ces considérations parce qu’il a parlé de la grâce, et qu’il se propose de