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de l’avis de tous, s’adressait à eux, il introduit David pour leur montrer que l’un se rattache à l’autre. Quelle nécessité, leur dit-il, à ce que le prophète en accusât d’autres que vous, lui qui avait été envoyé pour vous corriger ? Car la loi n’avait été donnée qu’à vous. Mais pourquoi Paul ne dit-il pas : Nous savons que tout ce que le prophète dit ; mais : « Que tout ce que la loi dit ? » Parce qu’il a l’usage de donner à tout l’Ancien Testament le nom de loi. En effet il dit ailleurs : « N’entendez-vous pas la loi ? Abraham eut deux fils ». (Sal. 4,21-22) De même ici il appelle les Psaumes la loi, en disant : « Nous savons que tout ce que la loi dit, elle le dit à ceux qui sont sous la loi ».
Ensuite il montre que cela n’a pas été dit simplement en manière de reproche, mais afin que la loi préparât les voies à la foi. Tel est l’accord entre l’Ancien et le Nouveau Testament que les « reproches et les louanges avaient certainement pour but d’ouvrir aux auditeurs, d’une manière éclatante, la porte de la foi. En effet, comme la principale cause de la perte des Juifs a été la haute idée qu’ils avaient d’eux-mêmes (ce que l’apôtre leur reproche plus bas en ces termes : « Ignorant la justice de Dieu et cherchant à établir la leur, ils ne se sont pas soumis à la justice de Dieu) ». (Rom. 10,3) La loi et les prophètes combattaient d’avance leur présomption, comprimaient leur orgueil, afin que, réfléchissant sur leurs fautes, dépouillant toute arrogance, et se voyant exposés aux derniers périls, ils courussent avec grand empressement à celui qui leur offrait la rémission de leurs péchés et accueillissent la grâce par la foi. C’est à quoi Paul fait allusion ici, quand il dit : « Nous savons que tout ce que la loi dit, elle le dit à ceux qui sont sous la loi, en sorte que toute bouche soit fermée et que tout le monde soit jugé digne des vengeances de Dieu ».
Ici il fait voir qu’ils n’ont point cette solide gloire que procurent les bonnes œuvres, et qu’ils sont seulement fiers et insolents en paroles. Aussi emploie-t-il ce mot propre : « En sorte que toute bouche soit fermée ». Signalant par là leur imprudente et intolérable jactance, et indiquant en même temps que leur langue est enfin refrénée ; car elle avait la violence d’un torrent, mais le prophète lui a mis le frein. Et par ces mots : « En sorte que toute bouche soit fermée », il ne veut pas dire qu’ils ont péché exprès pour qu’on leur fermât la bouche ; mais il veut seulement les convaincre de péché, afin qu’ils n’ignorent pas qu’ils sont pécheurs. « Et que tout le monde soit jugé digne des vengeances de Dieu ». Il ne dit pas, tout Juif, mais toute la nature ». D’un côté, ces expressions : « En sorte que toute bouche soit fermée », est une allusion aux Juifs, mais une allusion voilée, pour ne pas paraître trop rude ; de l’autre, celles-ci : « Et que tout le monde soit jugé digne des vengeances de Dieu », s’adressant tout à la fois aux Juifs et aux Gentils. Et ce n’est pas là un faible moyen de rabattre leur orgueil, que de leur montrer que sur ce point ils n’ont rien de plus que les gentils, et qu’ils sont livrés à la même perdition à l’égard du salut, car on appelle proprement υποδιχος; celui qui étant accusé ne peut se défendre lui-même, mais a besoin des secours d’autrui, comme nous étions nous-mêmes après avoir perdu tous les moyens de salut : « Car par la loi on « a la connaissance du péché ». De nouveau il revient à la loi, mais avec ménagement ; car ce n’est point elle qu’il accuse, mais la lâcheté des Juifs ; et comme il va parler de 1a foi, il tient à prouver ici que la loi était très-affaiblie. Si vous vous glorifiez de la loi, leur dit-il, elle vous couvre de honte : car elle accuse vos péchés. Cependant, il ne parle pas si rudement, mais avec plus d’indulgence : « Car par la loi on a la connaissance du péché (20) ». Donc, le châtiment en sera plus grand, mais pour les Juifs. La loi a eu pour effet de vous faire connaître le péché ; c’était à vous à l’éviter ; pour ne l’avoir pas fait, vous vous êtes attiré une punition plus sévère, en sorte que le secours même que vous offrait la loi est devenu pour vous l’origine d’un châtiment plus dur.
2. Après avoir ainsi augmenté leurs craintes il revient à parler de la grâce, pour leur inspirer un vif désir de la rémission de leurs péchés, et il dit : « Tandis que maintenant, dans la loi, la justice de Dieu a été manifestée (21) ». Il énonce là une grande chose et qui a bien besoin d’être prouvée. Si en effet ceux qui vivaient sous la loi non seulement n’ont point échappé au châtiment, mais se le sont attiré plus sévère, comment pourra-t-on, en dehors de la loi, non seulement éviter la punition, mais même être justifié ? Voilà