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jeté sur la terre vous rend de riches moissons, de même l’aumône multiplie les épis de la justice, et fait surgir l’abondance des plus magnifiques produits. Après avoir demandé au ciel, pour eux, cette fécondité, l’apôtre montre l’usage qu’il en faut faire, il dit : « Afin que vous soyez riches en tout, pour exercer, avec un cœur simple, tout ce qui nous donne sujet de rendre à Dieu de grandes actions de grâces.(11) ». Il ne faut pas faire de votre opulence un mauvais usage, il faut l’employer à des œuvres d’où naissent les plus grands sujets de rendre à Dieu des actions de grâces. Car Dieu nous a rendus maîtres des affaires les plus importantes ; il s’est réservé les moindres pour nous laisser celles du plus grand intérêt. Il a voulu être le maître de nous mesurer la nourriture du corps : quant à celle de l’esprit, il l’a laissée à notre libre arbitre ; il dépend de notre libre arbitre de rendre notre moisson pleine et abondante. Il ne faut pour cette récolte ni le secours des pluies, ni l’harmonie des saisons, il suffit de la volonté pour s’élever d’un bond jusqu’au ciel. Maintenant, par simplicité, l’apôtre entend l’abondance d’un cœur généreux, c’est là ce qui fait que nous donnons des sujets de rendre à Dieu des actions de grâces. En effet, cette munificence ne produit pas seulement l’aumône, mais elle est encore le sujet de nombreuses actions de grâces ; disons mieux, non seulement d’actions de grâces, mais encore de beaucoup d’autres avantages, que l’apôtre fait voir dans le développement de son discours, afin que cette exposition excite l’ardeur des fidèles. Quels sont donc ces avantages ? Écoutez : « Car cette oblation, dont nous sommes les ministres, ne supplée pas seulement aux besoins des saints, mais elle est riche et abondante par le grand nombre d’actions de grâces qu’elle fait rendre à Dieu parce que ces saints, recevant ces preuves, de votre libéralité par notre ministère, se portent à glorifier Dieu, de la soumission que vous témoignez à l’Évangile de Jésus-Christ, et de la bonté avec laquelle vous faites part de vos biens, soit à eux, soit à tous les autres ; et de plus, elle est riche et abondante par les prières qu’ils font pour vous, dans l’affection qu’ils vous portent, à cause de l’excellente grâce que vous avez reçue de Dieu (12, 13, 14) ». Or voici le sens de ces paroles : D’abord vous ne remplissez pas seulement les mains vides des saints, mais vous les comblez, vous dépassez la mesure du nécessaire pour eux ; ensuite, par leur moyen, vous glorifiez Dieu ; c’est en effet la gloire de Dieu qu’ils proclament par suite de votre soumission dans la foi. L’apôtre ne voulant pas que leurs actions de grâces s’expliquent uniquement par les bienfaits qu’ils ont reçus, en donne une cause bien plus élevée. Ce qu’il dit de lui-même ailleurs aux Philippiens : « Ce n’est point que je désire vos dons » (Phil. 4,17), il le dit aussi des fidèles de Jérusalem. Sans doute, dit-il, les saints se réjouissent que vous remplissiez leurs mains vides, que vous soulagiez leur indigence, mais ils se réjouissent bien plus de vous voir ainsi soumis à l’Évangile, c’est là ce que témoigne votre générosité.
Car c’est l’accomplissement du précepte de l’Évangile. « Et de la bonté avec laquelle vous faites part de vos biens, soit à eux, soit à tous les autres ». Ils glorifient Dieu, dit-il, de ce que votre libéralité ne s’adresse pas à eux seulement, mais s’étend aussi sur tous. Il y a encore, dans ces paroles, un éloge des saints qui bénissent Dieu des bienfaits répandus sur les autres. Ils ne louent pas seulement ce qui les concerne personnellement, dit-il, mais ils louent aussi le bien accordé aux autres, quoiqu’ils soient eux-mêmes dans la dernière indigence ; et c’est là une marque de grande vertu. Car il n’y a personne de porté à la jalousie comme les pauvres. Mais les saints de Jérusalem sont exempts de ce défaut ; ils sont si loin de s’affliger du bien des autres qu’ils s’en réjouissent tout autant que du bien qui leur est fait à, eux-mêmes. « Par les prières qu’ils font pour vous ». Assurément ils bénissent Dieu des biens qu’ils ont reçus, dit l’apôtre, mais, de plus, touchés de votre charité, de votre assistance, ils prient Dieu de leur faire la grâce de jouir de votre présence. Et en cela, ce n’est pas votre opulence qu’ils recherchent, mais la, joie d’être les spectateurs des grâces à vous accordées.
2. Voyez-vous la prudence de Paul ? en exaltant leur vertu, il en rapporte toute la gloire à Dieu, il l’appelle une grâce. Après avoir parlé d’eux en termes relevés, après les avoir appelés ministres, les avoir exaltés parce qu’ils s’épuisaient pour secourir les pauvres par des aumônes dont il n’était lui-même que le porteur, il fait voir que l’auteur de toutes choses,