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de les distinguer des Anglo-Saxons. Aussi discute-t-on franchement la mise en servitude de toute la population blanche qui ne possède point de terres. Une société à esclaves une fois consolidée sur une base despotique, le travailleur dépourvu de capital, le prolétaire, quelle que soit son origine, n’aura qu’à passer sous le joug.

Et quels sont les attraits assez puissants pour attacher à ce système, malgré la réprobation publique, la classe féodale des États-Unis ? Il y en a deux. L’un, c’est le bénéfice immense que l’on retire du travail manuel, appliqué à l’agriculture, lorsque l’on recourt à un personnel dont on borne systématiquement les besoins. Dans des pays exempts d’hiver, l’esclave est vêtu à peu de frais; on le nourrit des produits du domaine; on le loge dans des cabines de bois. Ses autres besoins ne sont considérés que pour mémoire. Afin de les circonscrire plus sûrement encore, on a remis en vigueur, avec une rigueur nouvelle, la loi qui défend de lui apprendre à lire. Une dame vénérable a été condamnée sévèrement pour avoir montré l’alphabet à deux petites mulâtres. Une action de charité, une oeuvre de bienfaisance, qui serait honorée en tout autre pays, et récompensée par l’estime des cœurs généreux, conduit ici à la prison et à la haine avouée de la classe dominante.

Le second attrait qui réside dans la possession des esclaves, c’est l’exercice du droit du seigneur sur les femmes. Toutes sans doute ne sont pas consentantes. Il y en a chez lesquelles la délicatesse des sentiments et la pureté du caractère ne le cèdent pas aux qualités vantées des plus nobles châtelaines. Que ne supposent-elles, dirait-on, à cette violation de la liberté personnelle?