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l’analyse le détail de la réalité complexe et mouvante, voilà, pour le prolétariat, la pensée complète. Et désormais, dans toutes les grandes crises nationales, il faudra compter avec lui.

Un premier et grand résultat est atteint. La procédure de révision est engagée et la cour de cassation est saisie du dossier de l’affaire. Mais la lutte n’est pas finie : et il y aurait un péril extrême à s’endormir. Les hommes qui ont machiné l’odieux procès contre Picquart pour empêcher l’ouverture de la révision recourront sans doute aux tentatives les plus audacieuses, les plus criminelles, pour troubler et fausser la révision commencée, pour affoler et égarer l’opinion. Désarmer pendant qu’ils se livreront aux plus louches manœuvres, ce serait une fois de plus trahir la vérité. Ce serait aussi trahir la classe ouvrière sur qui la haute réaction militaire épuiserait ses vengeances. Donc, la bataille continue.

Ce n’est pas que nous ayons aucune raison précise de mettre en doute pour l’affaire Dreyfus la bonne foi et le courage de la cour de cassation. Il se peut très bien qu’elle comprenne la grandeur de son devoir et de son rôle, qu’elle veuille faire acte de vérité, produire au jour tous les crimes et toutes les hontes, corriger les erreurs et refouler les violences de la justice militaire. Mais il se peut aussi qu’elle se heurte à de rudes obstacles et que