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M. le colonel Henry. ― Hé bien ! Allons-y. En 1894, j’ai l’honneur d’appeler votre attention sur les dates, messieurs les jurés, au mois de novembre, un jour le colonel Sandherr est entré dans mon bureau et m’a dit : « Il faut absolument que vous recherchiez, dans vos dossiers secrets, tout ce qui a trait aux affaires d’espionnage. ― Vous les avez classés ? ― Je lui ai dit : Oh ! ce ne sera pas long ; j’y suis depuis un an, depuis 1893. ― Eh bien, recherchez tout ce que vous avez, vous en constituerez un dossier. »

J’ai recherché ce que j’avais, et j’ai retrouvé, je crois, huit ou neuf pièces, ― je ne me souviens plus exactement du nombre ― dont une lettre importante ayant un caractère extra-confidentiel et, si vous voulez, extra-secret. Je fis un bordereau de ces pièces, je pris copie de quelques-unes, et je remis le tout au colonel Sandherr. C’était, comme je vous le disais tout à l’heure, messieurs les jurés, en novembre 1894. Le colonel le prit, le garda environ un mois. Vers le 15 ou le 16 décembre 1894, le colonel vint me trouver et me dit : « Voilà votre dossier. »

Ah ! pardon, avant il y a un détail important que j’oubliais.

Lorsque je remis le dossier au colonel Sandherr, je lui fis remarquer qu’une pièce secrète, pièce importante dont je vous parlais tout à l’heure, messieurs les jurés, ne devait pas sortir du bureau sans que nous en ayons le reçu ou la photographie. Il me répondit : J’en fais mon affaire ; je ferai faire des photographies. Il a fait faire deux ou trois photographies. Je ne me souviens plus exactement du nombre, dans tous les cas deux ou trois ― et comme je vous le disais tout à l’heure, il me remit le dossier le 15 ou le 16 décembre 1894.

J’appelle votre attention sur cette date, messieurs les jurés, parce qu’on a fait à ce dossier une légende, et je tiens à rétablir son histoire.

Puis le 16 décembre j’ai repris le dossier sans faire le dépouillement des pièces qui s’y trouvaient, j’ai remis le tout dans une enveloppe : la fameuse enveloppe dont je parlais tout à l’heure, sur laquelle j’ai écrit au crayon bleu : « Dossier secret » ; dans un coin de l’enveloppe, la lettre D et, au verso, après avoir collé l’enveloppe, mon paraphe ou presque ma signature au crayon bleu ; j’ai remis ce dossier dans le tiroir de mon armoire secrète et il n’en est plus sorti qu’au