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Maître Labori a défié qu’on osât la produire et la soumettre à des experts.

Mais quoi ! c’est sur d’aussi misérables indices que l’on juge un homme ! Dreyfus a dit qu’il avait l’onglée et que ses doigts étaient un peu gourds. Au matin du 15 octobre, à Paris, quand on vient du dehors, cela n’est point pour surprendre.

Mais, dit l’acte d’accusation, il était déjà au ministère depuis un quart d’heure.

Ainsi la culpabilité ou l’innocence de Dreyfus va dépendre de la rapidité avec laquelle, par une matinée un peu froide, la circulation du sang se rétablit à l’extrémité de ses doigts !

Tout cela est enfantin et misérable.

Et tout cela c’est l’œuvre de du Paty le faussaire, de du Paty l’inventeur niais et fourbe de la Dame voilée. Cette épreuve décisive qui a abouti à l’arrestation de Dreyfus a été conçue et conduite par l’homme le plus faux de conscience et d’esprit, et quand on découvre qu’en effet du Paty est à la fois un faussaire et un feuilletoniste malade, qui donc voudrait maintenir contre Dreyfus une épreuve toujours téméraire et incertaine mais qui pour avoir quelque valeur suppose du moins chez celui qui la dirige l’entière rectitude du sens moral et de la pensée ?

C’est dans sa source même que le procès Dreyfus est faussé.

C’est dans sa double racine, Henry et du Paty, qu’il est pourri.

Il est temps de l’arracher du sol.