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voilée est officiellement inscrite. Et il portait ce reçu aux journaux !

C’était le plus beau trophée de l’audace du traître sur la plate rouerie de Billot. Je ne connais pas de document plus monstrueusement bouffon que le reçu donné gravement par un ministre de la guerre à un traître qui rapporte un document volé au ministère. En voici le texte qui passera à l’histoire :

Commandant,

Le ministre de la guerre vous accuse réception du document que vous lui avez fait remettre à la date du 14 novembre, document qui vous a été donné, avez-vous dit, par une femme inconnue, et qui serait, ajoutez-vous, la photographie d’un document appartenant au ministère de la guerre.

Ainsi, on ne vérifie pas tout de suite si c’est bien en effet la photographie d’un document du ministère, car il aurait fallu arrêter immédiatement Esterhazy comme receleur. On se borne à enregistrer les affirmations du traître et à lui accuser réception du document. Le général Billot peut-il relire aujourd’hui toute cette histoire sans une rougeur de honte ?


VI

Mais pourquoi du Paty avait-il communiqué à Esterhazy, quelques jours avant le procès de celui-ci, une pièce secrète ? On sait aujourd’hui que c’est la fameuse pièce : « Ce canaille de D… » qui avait été illégalement communiquée par le général Mercier aux juges de Dreyfus, à l’insu de celui-ci.

Le rapport Ravary nous apprend que c’est cette pièce qui fut communiquée à Esterhazy. Pourquoi ? dans quel intérêt ?

Comme je l’ai fait observer dans ma déposition à la