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ils qu’ils avaient commis la faute d’avoir des relations avec un autre officier, Esterhazy ?

À en croire le récit de M. Casella, confident de M. Panizzardi, ils auraient protesté alors tout simplement qu’ils n’avaient pas eu de relations avec Dreyfus.

Mais, quelle qu’ait été leur attitude, qui ne voit que c’est au moment même de l’arrestation de Dreyfus qu’ils ont dû la décider ? C’est à ce moment que leur gouvernement, leur ambassadeur a demandé aux attachés militaires si Dreyfus leur avait servi d’espion. C’est à ce moment qu’ils ont convenu de la réponse à faire et de la conduite à tenir.

Ce n’est pas deux ans après le procès, à propos d’une interpellation, qu’ils vont déterminer leur plan de conduite : il l’est depuis longtemps ; et le fond même de la lettre qu’on leur prête, en octobre ou novembre 1896, est positivement absurde.


II

D’ailleurs, qu’on y prenne garde : s’il était vrai que M. de Schwarzkoppen et M. Panizzardi aient eu des relations d’espionnage avec Dreyfus, comment pourraient-ils le cacher à leurs gouvernements ?

Quand Dreyfus a été arrêté, M. de Schwarzkoppen a bien pu assurer à M. de Munster qu’il ne connaissait pas Dreyfus, parce qu’en effet il ne le connaissait pas. Il a pu s’abstenir de renseigner M. de Munster, personnage fatigué et peu au courant, sur le rôle d’Esterhazy.

Comme il expédiait directement, aux bureaux de l’espionnage à Berlin, les documents reçus d’Esterhazy, il a pu laisser ignorer ces pratiques à un ambassadeur légèrement ridicule et peu informé.

Mais comment MM. de Schwarzkoppen et Panizzardi, s’ils avaient réellement utilisé Dreyfus, auraient-ils pu former le plan de le cacher aux gouvernements de Berlin et de Rome ?