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connus par leurs travaux scientifiques dans l’étude des manuscrits et des archives peuvent être consultés, il est certain d’avance, tant l’identité est complète entre l’écriture d’Esterhazy et celle du bordereau, que la réponse de tous sera la même.

Et il n’y aura pas seulement unanimité des savants, on peut dire, s’il était possible de soumettre au peuple même, par de bonnes photographies, le bordereau et les lettres d’Esterhazy, qu’il y aurait unanimité du peuple.

Car avec la ressemblance ou mieux avec l’identité qui existe entre l’écriture du bordereau et celle d’Esterhazy, le premier venu peut se prononcer avec certitude. À ce degré d’évidence, il n’est plus nécessaire qu’on soit graphologue, comme il n’est pas nécessaire d’être physionomiste pour trouver un air de famille à deux jumeaux.

L’État-Major a été si épouvanté de cette unanimité des savants et de la force d’évidence de leur démonstration, qu’il a tenté d’en affaiblir l’effet en disant : « Ces messieurs n’ont pas vu l’original du bordereau, ils n’ont vu que le fac-similé du Matin. »

Et dans son zèle d’avocat d’Esterhazy, le général de Pellieux allait jusqu’à dire : « Toutes les reproductions qui ont été publiées ressemblent à des faux. »

Pitoyable diversion ! Car d’abords la défense, au procès Zola, a insisté violemment pour que l’original même du bordereau fût versé au procès et placé sous les yeux du jury. Le président et l’État-Major s’y sont opposés.

Il est certain que le bordereau aurait été montré si l’on avait pu ainsi confondre Zola.


III

Mais M. Paul Meyer, par son aimable et incisive dialectique, a obligé M. le général de Pellieux à la retraite. Il a démontré que la photographie d’un document, si elle pouvait parfois empâter ou écraser certains traits, n’alté-