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la Constitution l’article qui fixait à Versailles le siège des deux Chambres ; cet article fut abrogé et bientôt une loi décidait que le Parlement rentrerait à Paris. Le retour fut fixé au 3 novembre.

Enfin, vint en discussion le projet de loi sur la composition du Conseil supérieur de l’Instruction publique d’où l’élément religieux était exclu et celui relatif à la liberté de l’enseignement supérieur. Tous deux donnèrent lieu à de longs et passionnés débats durant lesquels le parti clérical lutta avec l’ensemble et toute l’activité dont il était capable. Le mémorable article 7, plus particulièrement, provoquait les fureurs de toutes les jésuitières déchaînées. Il portait : « Nul n’est admis à participer à l’enseignement public ou libre, ni à diriger un établissement d’enseignement de quelque ordre que ce soit, s’il appartient à une congrégation religieuse non autorisée ». M. Madier de Montjau, au nom de l’Extrême-gauche, avait présenté un amendement excluant de l’enseignement public ou privé tout membre du clergé séculier ou d’une congrégation religieuse ou ayant cessé d’en faire partie depuis moins de deux ans ; il fut repoussé. L’ensemble de la loi fut adopté par la Chambre des députés à une forte majorité.

Il s’agissait aussi d’organiser, de recruter un personnel destiné à assurer le fonctionnement laïque de l’enseignement, ainsi que l’exigeait la loi qui venait d’être votée. Il était à ce moment livré aux mains et aux inspirations de 37.600 congréganistes dont 5.700 seulement étaient munis de brevets ! Sur une proposition de M. Paul Bert, fortement combattue par la Droite, la création d’écoles normales d’instituteurs et d’institutrices fut rendue obligatoire pour chaque département. C’est de cette époque, que date la concentration de toutes les forces réactionnaires autour du parti clérical et les campagnes d’agitation, de menaces, de conspirations qui marquent l’histoire de la République et illustrent de façon saisissante les mouvements tels que le boulangisme et le nationalisme.

Tandis que se discutaient les lois sur l’enseignement, le prince impérial tombait au Transvaal, frappé par la zagaie d’un Zoulou ; l’incident émut aussi peu l’opinion que les manifestes lancés par le comte de Chambord et le prince Jérôme Napoléon.

Un siège était devenu vacant à Bordeaux ; le vieux révolutionnaire Blanqui était toujours détenu à Clairvaux après l’inique condamnation prononcée par le Conseil de guerre. Il n’avait pu participer au mouvement du 18 mars, puisqu’il avait été arrêté en province pour les événements du 31 octobre et ce, au mépris des engagements contractés, de la parole jurée. La grâce n’avait pas touché celui qui, toujours luttant pour la République, avait passé sa vie dans les geôles de la Monarchie et de l’Empire. Tout vieux et affaibli par les souffrances physiques et morales endurées, il effrayait encore ses classiques adversaires aux côtés desquels avaient pris plaie de trop nombreux républicains. Allait-on le laisser mourir en prison ? Ceci paraissait, hélas ! bien certain.