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les autres communes, les maires étaient chargés de la police, sous la férule du préfet et du sous-préfet. Dans chaque département, le représentant du pouvoir central avait directement sous ses ordres et à sa discrétion, comme nomination ou révocation, tous les agents de police appointés d’office par le budget communal, charge pour certaines municipalités souvent trop lourde.

À propos de ce projet, le gouvernement faillit éprouver un grave échec dû à l’initiative des légitimistes qui ne pouvaient lui pardonner la constitution du Septennal et l’élimination du cabinet de deux de leurs coreligionnaires, MM de la Bouillerie et Ernoul. Dès la rentrée de l’Assemblée Nationale, le 8 janvier 1874, M. de Franclieu, un des plus irréductibles « chevau-légers », avait déposé une motion tendant à l’ajournement du projet de loi et la proposition avait été adoptée par 268 voix contre 226. Le ministère était mis en minorité. Allait-il succomber ? Non, car quoiqu’il eût immédiatement remis sa démission, une manœuvre habile allait restaurer son crédit pour quelque temps encore. Le 11, c’est-à-dire trois jours après, le rappel des députés de la droite ayant été battu sur une interpellation « amicale » de M. de Kerdrel, désavouant M. de Franclieu, la majorité faisant confiance au cabinet, la loi sur les maires était remise à l’ordre du jour.

Le premier discours fut prononcé par M. Louis Blanc. L’ancien membre du gouvernement provisoire de 1848, qui était resté sur son siège durant la Commune, prit la défense des communes de France contre les entreprises des cléricaux ; il s’attacha surtout à mettre en contradiction le projet de loi avec les idées décentralisatrices dont la majorité de la droite s’était jadis fait un drapeau :

« Voilà donc où elle devait aboutir, dit-il, cette grande campagne contre la centralisation administrative, cette campagne commencée sous l’Empire et poursuivie depuis si vivement dans cette Assemblée ! chose étrange ! le gouvernement a beau, au milieu du calme le plus profond, être armé de toutes les ressources formidables qu’offre le régime de l’état de siège : il a beau en user avec une rigueur….. (on se récrie à droite) qui ne rencontre aucune résistance et qui n’a d’égale que la sérénité de l’opinion….. (très bien ! très bien ! et applaudissements à gauche) ; il a beau pouvoir tout ce qu’il veut et tout ce que la nation ne veut pas….. (nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs), on a découvert soudain qu’il a immensément besoin d’être fortifié et qu’il ne pouvait l’être que par une centralisation administrative poussée à l’excès.

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« L’unité est une chose excellente, sans doute ; mais enfin l’unité n’est pas l’étouffement.

« L’association communale renfermée dans ses limites naturelles, est si peu en désaccord avec le principe de l’unité, que c’est par elle, au contraire, que ce principe se réalise dans ce qu’il a de salutaire et de légitime.

« L’unité, en effet, n’est pas et ne saurait être une agglomération de forces