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qu’il croyait le mieux adaptés aux circonstances. Or, il avait cru, à tort selon moi, qu’il faciliterait et hâterait la solution de la question romaine en affirmant que la possession de Rome était nécessaire à l’Italie, que sans Rome l’unité italienne, ayant un corps sans tête, ne pourrait se réaliser au grand détriment de la sécurité européenne. Il demandait donc Rome comme le parti d’action, mais seulement en vertu d’une prétendue nécessité politique, tandis que les unitaires purs la réclamaient au nom de leurs principes de la nationalité.

« Tant que la question restait posée dans ces termes, il était bien évident qu’aucune transaction ne pouvait intervenir entre la France et l’Italie. Aussi, combien de fois, causant avec des hommes d’État italiens, mes amis, ne leur ai-je pas dit : votre politique est mauvaise ! Vous croyez dire quelque chose d’irrésistible en invoquant la nécessité de votre unité. Mais vous allez vous attirer de la part des catholiques une réponse formidable et qui sera sans réplique. La nationalité italienne veut Rome, vous diraient-ils, eh ! bien, la catholicité ne peut s’en passer. Et il est certain que si, pour prononcer entre les deux prétentions, la raison d’État doit être seule consultée, l’intérêt du catholicisme, ne serait-ce que par le nombre de ses adhérents, remporterait sur celui de l’Italie. Tant que vous posez la question dans ces termes, vous la rendez insoluble ; elle ne pourra faire un pas et vous serez condamnés à des déclamations creuses ou à des attentes stériles. Le moyen de sortir d’embarras n’est pas là ; il est dans l’acceptation de cette maxime que le pape a une souveraineté que vous devez reconnaître, accepter, protéger, à une condition : c’est qu’à son tour elle soit placée dans les conditions ordinaires de toutes les souverainetés humaines. Voilà la solution, leur disais-je ; elle est là et non ailleurs (Mouvements divers).

«… La convention du 15 septembre n’est plus maintenant difficile à expliquer : la souveraineté temporelle du pape reconnue, mais replacée aussitôt dans les conditions de toutes les souverainetés, voilà en deux mots ce qu’elle signifie. Elle repousse la solution des unitaires et de M. de Cavour, elle obtient de l’Italie la déclaration que désormais l’Italie ne prétendra plus à Rome en vertu du droit des nationalités ou en vertu de la nécessité de sa constitution intérieure. Mais, en échange, elle reconnaît que la souveraineté temporelle du pape sera désormais dans la condition des souverainetés ordinaires… La convention du 15 septembre ne peut signifier que ceci : l’Italie n’a pas un droit particulier sur Rome, mais la catholicité n’a pas davantage un droit particulier et exceptionnel sur cette ville… (Mouvements prolongés en sens divers.) La convention ayant écarté toutes les prétentions excessives, le patrimoine du Saint-Siège n’appartiendra ni aux catholiques ni aux Italiens. Il constituera une souveraineté indépendante sur le sort de laquelle n’auront plus à se prononcer que le pape et ses sujets. »

En vérité c’est une façon bien abstraite et bien factice de poser le problème. Éliminer comme quantités négligeables en droit les aspirations de l’Italie à