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Versailles, laborieux et souple pour les maîtres, violent et vulgaire contre les inférieurs ou les vaincus, dirigeait les travaux du Conseil d’État. A côté de lui, Rouher, le gentilhomme auvergnat, qui, après avoir protesté quinze jours contre les décrets du 22 Janvier, acceptait en compensation de son ministère, la direction de la section de législation au Conseil d’État. Le Corps législatif avait M. Billault, passé du socialisme et du droit au travail à l’absolutisme.

Les élections au Corps législatif avaient eu lieu en Février. M. de Morny pouvait se flatter de les avoir habilement préparées. Par la circulaire du 8 Janvier, il avait attiré l’attention des préfets sur « les hommes entourés de l’estime publique, plus soucieux des intérêts du pays que des luttes des partis, sympathiques aux souffrances des classes laborieuses, et s’étant acquis, par un bienfaisant usage de leur fortune, une influence et une considération méritée ». Puis, le 20 Janvier, par une nouvelle circulaire, le ministre de l’intérieur avait fait connaître la pensée du chef de l’État :

« Quand un homme a fait sa fortune par le travail, l’industrie ou l’agriculture, a amélioré le sort de ses ouvriers, a fait un noble usage de son bien, il est préférable à ce qu’on est convenu d’appeler un homme politique : car il apportera à la confection des lois un esprit pratique, il secondera le gouvernement dans son œuvre de pacification et de réédification ».

M. de Morny commandait en outre à ses agents de ne pas agir par l’intrigue, mais officiellement, par des discours et des affiches. Les candidats de l’opposition subiraient la censure des préfets ; le bulletin du vote pourrait être considéré, s’il était nécessaire, comme un objet de colportage.

Les candidats officiels, on ne s’en étonnera point, obtinrent presque l’unanimité. Les républicains décimés et traqués avaient songé à pratiquer une abstention générale, parce que, disaient-ils, prendre part au vote, c’était reconnaître le caractère légal du régime existant ; en fait, parce que les forces républicaines étaient abattues. A Paris, à Lyon, dans les deux grands centres démocrates, on ne put cependant se résigner. Cavaignac et Carnot furent élus à Paris, Hénon à Lyon.

Ils ne pouvaient, pensèrent-ils, prêter serment à l’auteur du Coup d’État : ils envoyèrent leur démission collective. « Les électeurs de Paris et de Lyon sont venus nous chercher, écrivaient-ils, dans notre retraite ou dans notre exil ; nous les remercions d’avoir pensé que nos noms protestaient d’eux-mêmes contre la destruction des libertés publiques et les rigueurs de l’arbitraire ; mais ils n’ont pas voulu nous envoyer siéger dans un Corps législatif dont les pouvoirs ne vont pas jusqu’à réparer les violations du droit ; nous repoussons la théorie immorale des réticences et des arrières-pensées ».

Des républicains ne vinrent donc pas troubler les doctes discussions de l’Assemblée ; les grands industriels, grands manufacturiers et grands propriétaires qui le composaient purent s’occuper en paix « des affaires ». Quatre