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en laine de Vienne, auxquels les secours des ouvriers parisiens étaient parvenus trop tard. Les grèves suisses et belges avaient également provoqué les actes de solidarité internationale.

En juin, le mouvement grandit. Les mineurs de la Loire, dont la caisse fraternelle fondée en 1866 n’avait pas craint de prendre part à la lutte électorale, engagèrent une campagne pour obtenir une augmentation de salaire et la journée de 8 heures. Le 11 juin 1809, la grève était à peu près générale dans le bassin. Le 16, un conflit meurtrier se produisit entre la troupe et les grévistes. Au puits Quintin, à la Ricamarie, il y eut du côté ouvrier 13 morts et 9 blessés.

Quelques semaines plus tard, éclatait à Lyon une nouvelle grève, celle des ouvrières ovalistes qui provoquait de la part des ouvriers rouennais et marseillais de l’Internationale un vaste mouvement de solidarité pour leurs sœurs lyonnaises. Paris, hélas ! épuisé par des grèves nombreuses, ne pouvait leur adresser des secours ni prêter des sommes. Mais le Conseil général de Londres, par l’organe d’Eugène Dupont, secrétaire général pour la France, leur envoyait une adresse d’ardente sympathie.

Sur tous les points du territoire des conflits semblables surgissaient encore, et le bruit courait parmi les conservateurs et les impérialistes qu’un mystérieux comité, travaillant à la chute du régime, les faisait éclater ainsi sur un simple mot d’ordre. Il n’en était rien ; et la correspondance de Varlin et d’Aubry suffit à indiquer avec quelles préoccupations et quelles inquiétudes les hommes de l’Internationale suivaient ce mouvement : « En voyant tant de grèves se produire à la fois, écrivait Varlin à Aubry le 6 août 1869, nous avions craint de voiries ouvriers échouer dans la plupart des cas. Heureusement il en a été autrement, à Lyon surtout, où presque toutes les corporations qui ont grevé ont obtenu de ne plus faire que dix heures de travail. Je considère toujours la diminution de la durée de la journée comme un résultat supérieur à l’élévation du salaire ; vous savez pourquoi.

« Quant à votre opinion que l’élément bourgeois n’a pas été étranger aux deux tiers des grèves qui se sont produites dans ces derniers temps, je reste d’un avis contraire au vôtre ; mais je n’essaierai pas de vous faire accepter mon opinion. Je n’ai pas le temps plus que vous d’engager une correspondance interminable sur ce point. Si nous nous rencontrons à Bâle ou à Paris, nous en reparlerons. Cependant, si je nie que les bourgeois soient intervenus dans les grèves, je reconnais très volontiers qu’ils ont tiré tout le parti possible de ce mouvement pour en faire retomber tout le poids sur notre organisation politique et sociale, et précipiter la révolution politique en excitant le mécontentement général. Je ne puis ni le regretter ni les en blâmer, car dans ce cas ils nous servent en même temps qu’eux ». (Troisième Procès de l’Internationale, p. 21).

En présence de toutes ces grèves les militants socialistes ne demeuraient pas inactifs. De plus en plus leur rôle se précisait : ils devaient, selon