côté de la Vénétie, retournaient les yeux vers Rome, là où précisément la France faisait encore obstacle. Conformément à la convention du 15 septembre 1864, à la fin de décembre 1866, les dernières troupes françaises avaient quitté Rome ; le drapeau tricolore avait disparu du fort Saint-Ange. La papauté avait ressenti d’abord quelque inquiétude ; puis les premiers mois de 1867 avaient été paisibles ; elle s’était rassurée. Dans Rome même, les hommes du parti de l’action, les révolutionnaires qui voulaient donner à l’Italie sa capitale, ne trouvait point d’intelligences.
Mais, depuis février, Garibaldi avait « débusqué de son nid » de Caprera ; il tonnait contre les prêtres, criait « Rome ou la mort », et réunissait déjà ses fidèles. Le gouvernement français s’en inquiétait : le gouvernement italien lui répondait en dénonçant les troupes pontificales réunies à Antibes comme des Français déguisés. En septembre, au Congrès de la paix, à Genève, Garibaldi lançait son cri de guerre. Arrêté un moment, puis relâché, il faisait pénétrer ses partisans dans les États pontificaux, cependant que Napoléon III à Biarritz s’inquiétait à la pensée d’avoir encore à s’occuper de l’Italie. Après de longues hésitations, après s’être laissé tirailler, comme autrefois, entre les italianissimes et les partisans du pape, l’Empereur se résolut enfin à défendre la papauté.
Le 25 octobre, les troupes françaises partirent de Toulon pour Rome. La dernière faute était commise. À Mentana, le 3 novembre 1867, les troupes de M. de Failly écrasèrent les Garibaldiens, et le général télégraphia que « les chassepots avaient fait merveille ». Ils avaient réveillé simplement, toutes les susceptibilités, toutes les rancunes des Italiens. Quelques semaines plus tard, le 4 décembre, Rouher achevait de creuser le fossé entre les deux nations. Renchérissant sur Thiers qui ce jour-là devait naturellement approuver la politique impériale, le ministre d’État, entraîné par les passions surexcitées de la Chambre, lança du haut de la tribune les paroles mémorables : « Jamais l’Italie ne s’emparera de Rome. Jamais la France ne supportera une telle violence faite à son honneur, faite à la catholicité ». Momentanément au moins, l’Empereur s’était réconcilié avec ses sujets catholiques. Mais il avait achevé d’isoler la Fiance, et c’était vers la Prusse que l’Italie allait désormais se tourner.
Ainsi s’achevait, en cette fin de 1867, la décadence de l’Empire français à l’extérieur. Les humiliations avaient succédé aux humiliations, les échecs aux échecs. Chaque jour apportait une nouvelle preuve de la faiblesse de l’Empire ; la France avait perdu son rang dans le monde ; et cela, le nationalisme, entretenu par l’Empereur lui-même depuis le début de son règne et dans un intérêt dynastique, ne pouvait le lui pardonner.
Par un retour singulier des choses, après toutes ses aventures libérales, après toutes ses tentatives pour réformer les traités de 1815, pour aider à naître les nationalités, pour réaliser en mot les idées napoléoniennes, c’était à la politique de réaction catholique du début de son règne qu’il se trouvait