tariat, en évitant toute lutte de classes. Les prolétaires conscients étaient avides d’instruction et de lecture : nous avons vu quelle place, les revendications d’enseignement tenaient dans les programmes ouvriers. Des bibliothèques populaires étaient fondées de tous côtés ; et pour répondre à l’ardent désir d’instruction qui tourmentait les prolétaires, les collections à bon marché de la Bibliothèque nationale et de la Bibliothèque utile étaient créées. Qui de nous n’en a retrouvé les volumes dans les modestes bibliothèques des travailleurs de l’époque ? Au même temps encore, le mouvement coopératif, aidé, lui, presque sans réserve, par la bourgeoisie, prenait un nouvel essor. En 1863, Beluze publiait par livraisons son livre sur les Associations, conséquence du progrès. La même année, à son Congrès de Gand, l’Association internationale pour l’avancement des sciences sociales se prononçait en faveur des sociétés coopératives. Les libéraux de toutes opinions s’intéressaient au mouvement ; et lorsque Beluze fonda le crédit au travail, il trouva dans tous les partis, depuis l’orléaniste Casimir-Périer et le catholique Cochin jusqu’aux républicains radicaux comme Clemenceau et Xaquet les plus chaleureux appuis. À cette première banque, Léon Say et Walras ajoutaient bientôt la Caisse d’escompte des associations populaires. En province, à Valence, à Lyon, à Lille, à Saint-Etienne, l’exemple était suivi. La coopération — c’est le nom que l’on substitue désormais à celui d’association, qui rappelle trop de déboires — la coopération, sous toutes ses formes, séduisait de nombreux prolétaires. De 1851 à juin 1863, 8 nouvelles sociétés seulement avaient été fondées ; de juin à décembre 1803, il y en eut tout de suite 15 en formation. Quelques mois plus tard, en novembre 1864, un journal était fondé, l’Association, destiné précisément à intensifier le mouvement coopératif. Seuls, des républicains y écrivaient. Son conseil de surveillance était composé de Beluze, Favelier, ancien rédateur de l’Atelier, Fleury, ancien représentant du peuple, Mottu, négociant, Noël Parfait, Elisée Reclus ; et dans son comité de rédaction, on peut relever les noms de Chassin, de Gustave Chaudey, de Cohadon, des maçons, de Davaud, gérant des sociétés de crédit mutuel, d’E. Despois, de Horn, l’économiste, de Laurent Pichat, d’Henri Lefort, bref de quelques ouvriers et des démocrates les plus avancés, les plus sûrs. La coopération n’éveillait point les mêmes inquiétudes que le mouvement des candidatures ouvrières, où s’exprimait déjà la conscience de leur classe prise par les militants de Paris.
Ceux-là, cependant, ne restaient pas inactifs ; et c’est à eux encore que nous devons consacrer le meilleur de ces pages, trop limitées en nombre. Au mois de mai 1864, le gouvernement, sous la pression de leur mouvement, leur donnait en partie satisfaction. Désirant regagner la classe ouvrière, dont les élections de 1863 avaient démontré l’hostilité, il avait résolu d’abroger la loi sur les coalitions. Le projet avait eu comme rapporteur M. E. Ollivier, qui, à cette occasion (nous aurons à en reparler) s’était définitivement séparé de la gauche : il avait rencontré l’opposition des industriels, qui redoutaient