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Les communistes, dont l’action grandissait sur la classe ouvrière à Paris, voulurent participer aux banquets réformistes et y affirmer leur foi politique et sociale. L’opposition prétendit ne les admettre qu’en soumettant leurs toasts à la censure préalable. Ils organisèrent alors, le 1er juillet, un banquet qui réunit douze cents convives, pour qui la réforme électorale voulait dire suffrage universel, et suffrage universel émancipation des travailleurs. Des discours enthousiastes y furent prononcés contre la peine de mort et pour l’établissement de l’égalité par la communauté.

Le 28, on transportait, en cérémonie officielle, sous la colonne de Juillet, les cendres des héros des trois journées. Drapeau rouge en tête, une colonne d’étudiants et d’ouvriers côtoyèrent le cortège en chantant la Marseillaise et en acclamant la réforme. La police se jeta sur eux, et un escadron de municipaux les dispersa avec la dernière violence.

Tandis que le prince de Joinville voguait vers Sainte-Hélène pour en ramener le corps de Napoléon, celui qui se disait le successeur du héros tentait de nouveau la fortune à Boulogne, le 3 août, et, avec quelques amis, essayait de soulever la garnison de cette ville. Arrêté sur-le-champ, il était traduit le 28 septembre avec ses complices devant la Cour des pairs et condamné à la détention perpétuelle.

Cet événement s’était produit dans un moment d’exaltation patriotique dont nous allons parler dans le chapitre suivant. Le césarion espérait bénéficier de cette exaltation. Son entreprise fut jugée ridicule. Il n’en ajoutait pas moins à la légende de son oncle la sienne propre, celle du pauvre prisonnier de Ham, et elles allaient toutes deux n’en faire bientôt qu’une.



CHAPITRE VIII


LA QUESTION D’ORIENT


Le traité du 15 juillet isole la France. — La situation en Orient : Mahmoud et Méhémet-Ali. — Thiers et Guizot joués par Palmerston. — L’exaspération patriotique en France. — Louis-Philippe crie plus fort que tout le monde. — Préparatifs belliqueux de Thiers. — Réveil du patriotisme allemand. — Becker et la Chanson du Rhin. — Lamartine répond par la Marseillaise de la paix. — Chute du ministère Thiers.


Dans les derniers jours de juillet 1840. on apprit, à Paris, que la Sainte-Alliance venait de se reformer et de s’affermir par un traité signé le 15, à Londres, entre la Russie, la Prusse, l’Autriche et l’Angleterre, comme conclusion d’une conférence à laquelle la France avait pris part. Qu’était-ce donc que ce traité, conclu sans nous, et qui mettait fin brusquement à des négociations enta-