gitimité de ses droits contre l’illégitimité des baïonnettes qui, de plus en plus nombreuses, se rangeaient derrière Bonaparte. On finit par prendre quelques mesures : c’est ainsi que le comte d’Artois, avec le duc d’Orléans, dont certains signalaient l’ambition comme un péril, et Macdonald furent envoyés à Lyon, où l’armée, comme on l’a vu, les hua. Le duc d’Angoulême partit pour le midi, et le duc de Bourbon, pour la Vendée. La presse officielle représentait Napoléon s’avançant difficilement sur les chemins, ne rencontrant que l’indifférence des populations ou même leur colère. Le Journal des Débats, au moment précis où Napoléon entrait à Lyon, le disait en fuite « sur les crêtes des montagnes » du Dauphiné. Pendant ce temps, Napoléon brûle les étapes, arrive à Auxerre, où il reçoit Ney tout tremblant, Ney qui avait promis à la royauté l’éclat de son épée et qui revenait à la suite de Napoléon, lui amenant le corps d’armée de Lons-le-Saunier, ou plutôt suivant l’entraînement irrésistible de ses soldats. À partir de ce moment, la marche vers Paris ne fut qu’un long triomphe : Napoléon, en calèche, avait peine à se frayer la route.
Il fallut bien que la cour et les ministres cependant apprissent la vérité. Alors, on tint conseil. Cette discussion confuse, où la terreur planait sur toutes les têtes, ne laissa place à aucune proposition sérieuse. M. de Blacas voulait que Louis XVIII allât, entouré de toute la cour, à la rencontre de Napoléon. À son seul aspect, « l’usurpateur » et sa bande s’inclineraient. Mais Louis XVIII était d’une famille qui avait appris que Bonaparte s’inquiétait peu des titres et du rang et du nom et que les fossés de Vincennes étaient très près de la barrière. Il refusa d’être l’acteur sacrifié d’une inutile parade. Marmont un stratège, offrait de résister dans les Tuileries ! Seul M. de Vitrolles donne le conseil le moins impraticable : aller à La Rochelle, se garder à droite par Bordeaux, à gauche par Angers, dans ces régions royalistes, et résister, ayant à portée la flotte anglaise. Le roi prit un mois dangereux chemin : ce fut celui d’un nouvel exil et qu’il connaissait pour l’avoir suivi lors de l’émigration. Sans prévenir personne, il partit le soir, enveloppé, dans sa lourde voiture, d’un linceul de pluie, accompagné de Marmont, de Macdonald, oubliant ses lettres, la correspondance de Talleyrand, mais emportant les diamants de la couronne. Après lui, le duc d’Orléans, le comte d’Artois partirent avec une pauvre armée de partisans. Le roi alla se fixer à Gand, où toute la cour et le comte d’Artois vinrent le rejoindre. Disons tout de suite que les résistances royalistes en province furent vaines. En Vendée, le duc de Bourbon fut obligé de fuir à travers champs, le soulèvement sur lequel il comptait ne s’étant pas opéré. À Bordeaux, la duchesse d’Angoulême harangua les troupes, reçut à nouveau leur serment, puis fut abandonnée à ses sanglots, reconduite avec égards, la ville se livrant sans combattre au général Clauzel.