et qu’est-ce que l’industrie seule ? Ils ne valent que par leurs rapports avec les autres branches de l’activité nationale, et quand on les a toutes passées en revue, on s’aperçoit que mieux vaut une assemblée où elles ont toute latitude pour être politiquement représentées. Le 8 janvier 1817 la loi fut votée par 132 voix contre 100. À la Chambre des Pairs, le combat fut plus âpre et la gentilhommerie exaspérée tint en échec le projet jusqu’au 30 janvier : il fut voté par 95 voix contre 77.
M. Lainé fit ensuite triompher une loi qui, tout en maintenant les principes odieux de la loi du 29 octobre 1815, les atténuait. Cette loi donnait, sur une plainte quelconque, à tout fonctionnaire, le droit d’arrestation et de séquestration sur tout citoyen accusé de complot contre la sûreté de l’État. M. Lainé remit ce droit au président du Conseil et au ministre de la Police. C’est la droite qui fit le plus dur accueil à ce projet. Et non pas parce qu’il détruisait en partie l’œuvre néfaste de 1815, mais, cela est à peine croyable, au nom de la liberté ! Imprudente et oublieuse opposition qui, la veille encore, se servait des lois comme d’instruments de torture, avait déchaîné sur le pays toutes les terreurs, était cause de séquestrations sans fin et qui maintenant flétrissait les liens dont ses propres victimes étaient garrottées. Cette étrange et inconcevable mobilité sera, à travers le siècle, la loi politique des oppositions monarchiques.
Mais ce fut sur le budget que la droite put manifester tout son zèle clérical. M. Corvetto présenta un budget qui dépassait un milliard : la seule particularité de ce budget était le relèvement, par une forte dotation, de la Caisse d’amortissement. Et avec quelle somme le ministre dotait-il la Caisse ? Avec le produit de la vente des bois de l’État (150 000 hectares), C’est là que la colère cléricale éclata : « Ces bois avaient appartenu au clergé et il fallait les lui rendre. Cette mesure était une spoliation révolutionnaire ». Il faut dire qu’en échange le clergé recevait 4 millions de rentes, inscrites au grand livre et hypothéquées sur des forêts de l’État. Le budget fut voté cependant (135 voix contre 88), non sans que M. de Villèle ait réclamé 200 millions d’économies réalisées par lui sur les traitements des fonctionnaires. Bien entendu, chef de la majorité la veille encore, M. de Villèle n’avait pas reçu du ciel cette inspiration salutaire : elle ne lui venait que dans l’opposition.
Le cabinet, moins ce demi-échec, était donc victorieux à la Chambre. Dans le pays, il laissait marcher les choses et déjà un esprit clairvoyant eût aperçu les germes de la défaite. C’est que M. Decazes, soit que la vigueur de son opération eût épuisé son énergie, soit qu’il s’abandonnât à l’orgueil du triomphe, n’avait pas prolongé dans le pays sa politique. Sûr du vœu du roi, assez peu habile, au sens profond du mot, pour baser toute son influence sur une fragile amitié, il se contentait de votes parlementaires sans donner dans la nation, au gouvernement, l’armature nécessaire. Tous les fonctionnaires en place en 1815 et dont beaucoup avaient servi avec joie les