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qu’il dorme, pourvu qu’il mange. Mais le délateur a suivi sa proie, et des carabiniers italiens arrêtent Didier dans une gorge farouche.

Le cours de la justice avait repris à Grenoble ; c’est en cour d’assises que comparut Didier. Son attitude fut ferme, sa parole grave, son regard hautain. Il s’attendait à son destin. Sa femme, vaillante jusqu’à la dernière minute, demeure près de l’époux que tant d’infortune lui rendait plus cher ; elle dut céder la place au général Donnadieu qui venait solliciter de suprêmes révélations. Celles-ci ne deshonorèrent pas les lèvres du vieillard stoïque, qui se contenta, donnant plutôt un avis, de conseiller au roi de se défier du duc d’Orléans. Après quoi, la dernière victime du complot alla rejoindre les malheureux que sa légèreté, cependant bien répréhensible, avait offert au peloton d’exécution… C’était pour le duc d’Orléans que mourait Didier. Quatorze ans plus tard, n’étant encore que lieutenant-général du royaume, le duc d’Orléans recevra l’offre de services du général Donnadieu ! Le fils de Didier, M. Louis Didier, secrétaire général du ministère de l’intérieur, subira l’humble visite de M. de Vautié…

Quand les complots n’existaient pas, la police les inventait afin de fournir une preuve de son zèle en les découvrant et, au gouvernement qui les châtiait, une occasion de mériter la faveur publique. Au mois d’août, à Paris, un nommé Scheltein, dans un café, s’offrait à tous pour l’exécution d’un plan tragique : apporter par des souterrains sous les Tuileries trente barils de poudre et faire sauter toute la maison royale. Personne ne lui répond. Mais on arrête deux ouvriers, Plaignier, cambreur ; Tolleron, ciseleur ; un écrivain public, Carbonneau. Ces trois hommes avaient auparavant jeté les bases d’une association secrète qui ne se réunissait nulle part, attendu que les membres étaient inconnus les uns aux autres, mais qui avait distribué plus de six mille cartes où se trouvaient inscrits les mots : Union, Honneur, Patrie. Ils étaient au cabaret lorsque les propos avaient été tenus. Cela suffisait. Mais qui donc les avait dénoncés ? C’était l’auteur improvisé, celui qui faisait le projet public de l’opération, un agent de police nommé Scheltein. Il fut à son tour dénoncé par les malheureux qu’il avait fait arrêter ; on ne put le trouver, la préfecture de police l’ayant fait disparaître sous le nom de Duval. Des complices furent trouvés aux trois accusés, qui furent condamnés à subir la peine des parricides, tandis que les infortunés, dont une femme, qu’on leur avait adjoint pour les aider dans un complot imaginaire, succombaient sous les mois de prison. Eux furent conduits au supplice avec le funèbre appareil qui, à ce moment, enveloppait jusqu’à la mort les parricides : ils allèrent à pied, revêtus d’un voile noir, entendirent la lecture de l’arrêt, et puis les poignets droits des condamnés tombèrent sur le sol. Après quoi leurs têtes furent tranchées.

Les délations étaient partout, et contre les anciens officiers de Napoléon les poursuites étaient reprises. Il en était comme Clausel, comme Drouet