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qu’il fit à Napoléon des ouvertures au sujet d’un mariage éventuel avec l’infante Isabelle d’Espagne. Le second, en 1801, intervint pour conseiller le divorce.

Ni l’un ni l’autre ne furent tout d’abord écoutés ; toutefois, dans son livre sur le Divorce de Napoléon, M. Welschinger établit que, dès cette époque, la résolution de Bonaparte était prise, qu’il fallut l’énergique intervention de Pie VII pour obtenir que le mariage civil de 1776 fût consacré à l’église et que Joséphine fût admise au sacre. Encore, fait remarquer M. Welshinger, l’empereur s’arrangea-t-il de façon à vicier cet acte pour en rendre plus tard l’annulation possible.

L’idée du divorce se manifesta de nouveau avec plus de consistance encore pendant l’entrevue d’Erfurt, où Napoléon eut l’ambition d’un mariage avec une sœur du czar, projet aussitôt contrecarré par l’opposition formelle de la mère d’Alexandre.

Enfin la résolution définitive fut prise à Schœnbrunn, après la prise de Vienne ; elle était devenue inébranlable quand Napoléon reparut à Fontainebleau, le 20 octobre, et Joséphine le comprit aussitôt lorsqu’elle vit supprimer la porte particulière qui faisait jadis communiquer son appartement à celui de l’empereur.

C’est le 30 novembre que Napoléon se chargea lui-même de signifier sa volonté à Joséphine.

La chronique raconte que la scène fut émouvante, que Joséphine eut une attaque de nerfs, que Napoléon versa des torrents de larmes, et que le préfet du palais, appelé en toute hâte, trouva l’impératrice inanimée sur le tapis et l’empereur sanglotant sur le lit.

Après la scène intime eut lieu la scène officielle organisée aux Tuileries, sous la présidence de l’archichancelier Cambacérès. Là, en présence de toute la famille impériale, Napoléon lut un discours où il vantait son regret du sacrifice : « Parvenu à l’âge de quarante ans, dit-il, je puis concevoir l’espoir de vivre assez longtemps pour élever dans ma pensée et dans mon esprit les enfants qu’il plaira à la Providence de me donner. Dieu sait combien une pareille résolution à coûté à mon cœur : mais il n’est aucun sacrifice qui soit au-dessus de mon courage, lorsqu’il m’est démontré qu’il est utile à la France. »

À cette déclaration hypocrite, la victime bien stylée répondit par son consentement donné au divorce.

Il ne restait plus alors qu’à procéder aux dernières formalités : le Sénat s’empressa de prononcer le divorce civil, et nous avons vu plus haut comment fut obtenu le divorce religieux.

Napoléon était libre désormais de contracter une nouvelle union.

À cet effet, le conseil des ministres consulté se prononça à la majorité pour une union avec une princesse russe, et M. de Caulaincourt, l’ambassa-