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vanche, le premier Mercier dit La Vendée — il nous était réservé de connaître le second — surprenait Saint-Brieuc le 5 (27 octobre) ; il avait déjà sous ses ordres les surnommés Justice, César et Pierrot (Chassin, les Pacifications de l’Ouest, t. III, p. 406) ; ils n’eurent pas le temps de vider les caisses, mais assassinèrent le commissaire du Directoire près l’administration municipale, Poulain-Corbion, qui refusa de crier : « vive le roi », le capitaine de gendarmerie, trois gendarmes, trois autres militaires ; on ne dit pas si ce fut au cri de : Vive l’armée ! Le 19 (10 novembre), dans l’Ille-et-Vilaine, Redon était pris et évacué après pillage. Dans le Calvados, Frotté échoua le 5 (27 octobre), à Vire. Dans les Deux-Sèvres, d’Autichamp fut mis en déroute, le 13 (4 novembre), aux Aubiers, village entre Châtillon et Argenton, à égale distance de ces deux villes. Malgré les développements de l’insurrection dans la Mayenne et en Normandie, et malgré les subsides reçus des Anglais du 1er au 5 novembre, les royalistes n’eurent pas de succès durable. Le général Hédouville, nommé le 30 vendémiaire an VII (22 octobre 1799), général en chef de l’armée d’Angleterre à la place de Michaud, entrait en fonction, le 12 brumaire (3 novembre), à Angers, sans se préoccuper de Michaud, qui était à Rennes et ne sut que le 20 (11 novembre) qu’il était remplacé (Revue historique, t. LXXVIII, p. 299 et 300). Hédouville, qui tenait du Directoire les pouvoirs qu’avait eus Hoche, venait d’entamer, non des opérations militaires, mais des négociations dans des conditions assez louches avec une royaliste, Mme Turpin de Crissé, et Frotté, Bourmont, Châtillon, d’Andigné, lorsque Bonaparte fit son coup d’État du 18 brumaire.

CHAPITRE XXI

MOUVEMENT JACOBIN — MENÉES RÉACTIONNAIRES DES MODÉRÉS

(messidor an VII à vendémiaire an VIII-juin à octobre 1799.)

Les différences de situation après une défaite et après une victoire étant plus tranchées pour les partis extrêmes, surtout pour les partis d’avant-garde, que pour les autres, le parti qui parut le plus triompher après le 30 prairial, fut le parti jacobin. Si, depuis la réaction thermidorienne, ce nom et celui d’anarchiste servaient à désigner, quelles que fussent leurs nuances, les républicains sincères, les partisans d’une République démocratique, c’était bien l’esprit jacobin — on peut dire, je crois, l’esprit jacobin, comme on dit aujourd’hui l’esprit radical et radical-socialiste, malgré des divergences d’idées entre membres de ces partis assez assimilables, d’ailleurs, en masse — qui dominait dans le Conseil des Cinq-Cents au début de la nouvelle législature ; c’était cet esprit qui avait inspiré les lois de l’emprunt forcé et des otages.