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une attaque du pont de Lecco repoussée par la division de Sérurier, l’armée elle-même parvenue, le 7 (26 avril), sur la rive gauche de l’Adda, franchissait cette rivière de telle façon que la ligne des Français se trouvait coupée en deux endroits, battait, le 8 (27 avril) à Cassano, Grenier qui eut, avec 11 000 hommes, à soutenir le choc de 25 000, et forçait Moreau à la retraite. Au lieu de se replier sur Plaisance, afin de rester en communication avec l’armée de Naples qu’il attendait, celui-ci se retira sur Milan, puis sur Turin ; à peine à Milan, en effet, il avait fait évacuer la ville en laissant dans le château 2 400 soldats ; ces derniers, de même que les 3 000 laissés un peu plus tard dans la citadelle de Turin, auraient pu être mieux employés. Le 9 (28 avril), Sérurier, cerné, était, malgré une vigoureuse résistance, contraint à capituler et, le même jour, Souvorov faisait à Milan une entrée aussi triomphale que l’avait été celle de Bonaparte. La République cisalpine était livrée aux alliés ; une insurrection avait éclaté en Lombardie, comme, du reste, dans les autres régions de l’Italie que les Français avaient occupées et pressurées.

Moreau, revenant sur ses pas, avait, le 18 (7 mai), établi Grenier entre le Pô et le Tanaro, non loin d’Alexandrie, Victor entre Alexandrie et les sources de la Bormida, et il avait chargé Pérignon, récemment arrivé à Gênes, de commander les troupes stationnées en Ligurie et de garder les débouchés sur cette ville. À cette même époque, les places que nous tenions encore dans la région du nord commençaient à tomber entre les mains de l’ennemi ; c’était le cas pour Peschiera, Pizzighettone, au confluent de l’Adda et du Serio, et la ville de Tortone (20 floréal-9 mai) dont la citadelle nous restait. Un corps russe étant passé, le 23 (12 mai), sur la rive droite du Pô, à Bassignano, localité au confluent du Pô et du Tanaro, Moreau le culbuta après un combat sanglant ; mais les alliés, le 26 (15 mai), étaient à Novi ; la route d’Alexandrie à Gênes se trouvait coupée ; Moreau échoua, le 27 (16 mai), dans une tentative du côté de Marengo et dut regagner la rive gauche de la Bormida. Voulant à tout prix rester en communication avec Gênes, le 28 (17 mai), il envoya, par Acqui et Dego, Victor qui, le 30 (19 mai), communiqua avec Pérignon installé un peu au nord de Gênes, au col de la Bocchetta, et lui-même, laissant 3 000 hommes à Alexandrie, se porta par Asti et Savigliano au-dessus de Savone. Souvorov, que le succès de Lecourbe sur le prince de Rohan, le 24 (13 mai), du côté de Lugano, avait inquiété, aurait volontiers envahi la Suisse ; mais un ordre de l’empereur l’immobilisait en Italie tant que Mantoue et les autres places bloquées ne se seraient pas rendues. Ayant appris la retraite de Moreau, il dirigea, le 2 prairial (21 mai), des forces par Chivasso sur Turin où, à l’exception de la citadelle, elles entraient le 7 (26 mai), tandis que d’autres investissaient le fort de Tortone et Alexandrie ; sauf la citadelle, cette dernière ville était en leur pouvoir le 10 (29 mai). Les Piémontais sont dans la joie. « Mais, les lampions éteints, ils s’aperçoivent vite que les char-