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25 thermidor (12 août) à Orléans et conduit à Bourges, Phélyppeaux, dont les amis ; achetèrent les gardiens, s’évada le mois suivant ; nous le retrouverons plus tard (chap. xix). Ce que M. Vandal (L’avènement de Bonaparte, t. Ier p. 18) a appelé « le brigandage politique » des royalistes et catholiques, ne va plus, pendant quelque temps, se manifester que par des attentats isolés ; cela va devenir, suivant l’expression du même auteur (Idem), « le royalisme de grands chemins ».

La question financière fut, dès le début du nouveau gouvernement, la source des plus graves soucis. Le 12 brumaire an IV (3 novembre 1793), nous l’avons vu (chap. xi, début du § 1er), 100 livres en assignats valaient moins d’une livre en numéraire, et la livre n’était inférieure au franc que de un centime et demi à deux centimes. Malgré leur extrême dépréciation, les assignats étaient la seule ressource immédiate ; moins ils valaient, plus on multipliait les émissions, afin de compenser leur peu de valeur par leur quantité, et cette multiplication contribuait à son tour à accroître la baisse. Un arrêté du 18 brumaire (9 novembre) consacra la papeterie d’Essonne à fournir le papier nécessaire à leur fabrication ; 800 ouvriers travaillant sans relâche eurent de la peine à suffire à la consommation ; « la fabrication des assignats est moins rapide que la dépense », écrivait, le 20 brumaire (11 novembre), le ministre Faipoult (Stourm, Les finances de l’ancien régime et de la Révolution, t. Il, p. 308), et on put entrevoir le moment où les frais de fabrication des assignats seraient plus élevés que leur valeur réelle ; celle-ci tombait dans la dernière décade de brumaire an IV (novembre 1795), toujours par 100 francs, à 15 sous ; de frimaire (décembre) à 10 sous ; de nivôse an IV (janvier 1796) à 9 sous ; de pluviôse (février) à 7 sous, tandis que la fabrication du Directoire, en quatre mois, allait dépasser 20 milliards et monter exactement à 20 150 930 000 livres. Avec la fabrication de la Convention (chap. vi), soit 21 677 425 000 livres, et celle de la Constituante et de la Législative, soit 3 753 056 618 livres (Révolution française, revue, t. XV, p. 528 et 529), on devait atteindre le total de 45 581 411618 livres donné par Ramel (Des finances de la République française, p. 18). D’après Eschasseriaux aîné, dans le rapport déposé aux Cinq-Cents le 22 brumaire an IV-13 novembre 1795 (Moniteur du 3 frimaire - 24 novembre), les ordres de fabrication jusqu’au 8 brumaire au IV (30 octobre 1795) montaient à 29 430 481 623 livres ; mais, à cette date, il restait sur cette somme à fabriquer pour une valeur de 5 101 110 005 livres ; il y avait, en outre, à déduire 5 395 907 154 pour assignats brûlés, démonétisés ou encore en caisse, et il estimait « la circulation réelle >, au 15 brumaire (6 novembre), égale à 18 933 464 464 livres.

On avait bien essayé d’obtenir de l’argent par d’autres moyens : la loi du 19 frimaire an IV (10 décembre 1795), par exemple, avait eu recours, comme celle du 20 mai 1793 (Histoire socialiste, t. IV, p. 1666), à un emprunt forcé. Fixé à 600 millions, celui-ci n’était autre chose qu’un impôt sur les « ci-