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bourgeoise continuait, à l’avantage de la féodalité financière, l’évolution capitaliste commencée ; mais en donnant, pour ainsi dire, une seule tête à cette féodalité, elle accroissait pour l’avenir l’envie et la possibilité de l’abattre d’un seul coup au profit de la nation tout entière.


Banque de France.
ANNÉES ESCOMPTE ENCAISSE MINIMUM — MAXIMUM PORTEFEUILLE MINIMUM — MAXIMUM
1848 1.643.7.. 92 à 249 168 à 303
1849 1.025.7.. 269 à 420 116 à 164
1850 1.176.4.. 4.38 à 477 100 à 139
1851 1.241.4.. 476 à 623 94 à 149
Le chiffre de 1847 est atteint et dépassé en 1853.


Les premiers projets de Banque nationale, qui aient été déposés dans une Chambre française, datent précisément de l’année 1848. Il y en a un d’abord dans les propositions faites par la Commission du Luxembourg ; puis il y en a un autre du 30 Août 1848, signé de Brunet, représentant de la Haute-Vienne. Mais l’homme qui se cramponne à cette idée, c’est Proudhon.

Esprit entier, s’il en fut, il n’admet qu’une façon d’aborder le problème social : c’est par le côté de l’échange. Il faut, selon lui, transformer la circulation pour transformer la production. C’est le droit au crédit qu’il proclame et entend organiser. Son système consiste à établir le crédit gratuit, à supprimer toute redevance au capital, ce despote qui domine et opprime le travail. Dès lors, tous les moyens de production deviennent accessibles à ceux qui veulent les mettre en œuvre, et, les produits ne s’échangeant que contre des produits, il n’y a plus, au moyen d’une Banque d’un genre spécial, qu’à instituer un échange direct entre producteurs et consommateurs. Proudhon vise ainsi le capitalisme au cœur ; il veut l’atteindre dans la reproduction automatique en apparence, mais due en réalité au travail d’autrui, de la richesse capitalisée ; il veut priver la propriété des droits seigneuriaux qui lui permettent de vivre comme un roi fainéant ; c’est une façon indirecte de faire disparaître le propriétaire oisif, dont l’entretien pèse sur le travailleur.

Il imagine, pour arriver à son but, trois projets distincts, procédant tous du principe de mutualité (c’est-à-dire d’échange de services entre tous les membres de la société.

Le premier, où il fait appel à l’autorité de l’État pour remédier à la stagnation des affaires, est la fameuse proposition qui fut discutée dans la séance du 31 Juillet 1848 (voir plus haut page 97). A partir du 15 Juillet, il sera mis un impôt d’un tiers sur tous les revenus de biens meubles et immeubles, impôt unique remplaçant tous les autres. En conséquence, tous propriétaires de maisons et de terres, tous détenteurs de créances hypothécaires