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ment un peu pauvre était comme dévoré par la fièvre de la pensée et de la lutte ? Baudot, dans ses notes magistrales, a très bien marqué cela.

« La famille Duplay rendait une espèce de culte à Robespierre. On a prétendu que ce nouveau Jupiter n’avait pas eu besoin de prendre les métamorphoses du dieu de l’Olympe pour s’humaniser avec la fille aînée de son hôte, Éléonore. Cela est de toute fausseté. Comme toute sa famille, cette jeune fille était fanatique du dieu Robespierre, elle était même plus exaltée à raison de son âge. Mais Robespierre n’aimait point les femmes, il était absorbé dans son illumination politique : ses rêves abstraits, ses discours métaphysiques, ses gardes, sa sûreté personnelle, toutes choses incompatibles avec l’amour, ne donnaient chez lui aucune prise à cette passion. Il n’aimait ni les femmes ni l’argent, et ne s’occupait pas plus de ses intérêts privés que si tous les marchands eussent dû être pour lui des fournisseurs gratuits, obligés, et les maisons des auberges payées d’avance pour son usage. Et en effet, il agissait ainsi avec ses hôtes. »

Le trait est vif, mais juste. C’était en somme une existence commode. La vie de Brissot, qui avait une famille à soutenir, et qui était accablé de travaux et d’affaires, était bien plus dure et plus difficile. Et est-ce Desmoulins, heureux de vivre, marié à une femme riche qu’il adorait, toujours papillonnant aux joies du monde, aux lustres des salons éclatants, est-ce Desmoulins qui pouvait accabler la Gironde pour son manque d’austérité ?

Non, ce n’était pas là le grief profond du peuple.

Les Girondins s’étaient-ils mis par un esprit de douceur et de faible humanité en dehors des nécessités révolutionnaires ? Pas davantage. Ils savaient, quand il le fallait pour leur cause, être implacables. La lettre publiée de Roland à Louis XVI était un coup de couteau. Contre les massacres de septembre leur révolte fut tardive et calculée. Ils essayèrent d’assassiner moralement Danton par des insinuations atroces et des libelles infâmes ; ils tentèrent de livrer Marat au bourreau. Mais qu’on lise la correspondance de Mme Roland publiée par M. Perroud. Dans toute l’année 1791, elle pousse aux mesures violentes. Elle fait l’apologie de Marat et du « vigoureux Danton » ; elle annonce qu’on ne pourra arriver à la liberté « qu’à travers une mer de sang ». Ah ! non, la clémence, la pitié étaient pour les Girondins manœuvre et tactique, et ce ne fut pas la sensibilité humaine de leurs fibres qui les livra sans défense à la brutalité des événements.

Furent-ils égarés par une idée fausse, par un système abstrait ? Baudot a écrit :

« Les Montagnards pensaient que pour défendre le sol et maintenir l’existence de la Révolution, il fallait continuer les mesures violentes ; les Girondins, au contraire, voulaient faire tout de suite l’application de leurs vues organiques. »

Mais ici il ne faut pas renverser les causes et les effets. Ce n’est point