chose publique. Je représentai au maire qu’une pareille assemblée exigeait toute la surveillance des premiers magistrats de la police, et qu’il devait instruire le ministre de l’intérieur de tout ce qui s’y passerait jour par jour, heure par heure ; le maire m’en donna l’assurance et je retournai au Comité de salut public lui rendre compte de cette conversation. »
Délicieux interrogatoire ! Comme si Garat ne savait pas depuis des semaines que les sections préparaient un mouvement révolutionnaire ! Quand la faiblesse d’esprit et de volonté prend ainsi des airs méditatifs et des allures analytiques, elle est d’un comique lamentable. Pache, réveillé par le pauvre philosophe questionneur et affairé, le trouva sans doute pleinement ridicule. Il lui répondit en termes évasifs. Le trompa-t-il délibérément en lui disant que l’assemblée s’était reconnue incompétente, alors que les sections, selon l’invitation de celle de la Cité, avaient donné à leurs délégués un mandat illimité ? Ou bien lui-même ignorait-il encore jusqu’où allait l’audace insurrectionnelle de l’Évêché ?
Des paroles de Garat il n’est guère possible de conclure avec certitude qu’une commission nouvelle (de dix membres ou de neuf) fut substituée à la Commission des Six. L’informateur qui renseigna Garat ce soir-là avait très bien pu prendre pour une commission nouvellement nommée la Commission des Six, qui parlait d’un ton d’autorité si impérieux. Il me paraît surprenant que la note si minutieuse communiquée à la Commission des Douze et citée par Bergoeing, ne fasse pas mention d’un fait aussi important que le serait la nomination expresse d’une commission exécutive nouvelle. Elle parle si souvent de la Commission des Six qu’il est malaisé de supposer qu’elle n’en aurait pas signalé le remplacement.
Schmidt est conduit à une hypothèse bien invraisemblable et bien fragile : c’est qu’il y avait ce soir-là à l’Évêché deux assemblées distinctes ; l’une, des délégués sans mandat formel, qui avaient l’habitude de se réunir depuis plus de quinze jours ; l’autre, des délégués à mandat illimité que venaient de nommer les sections en vue d’organiser l’insurrection. Il n’était pas aussi facile d’établir des cloisons étanches. Et sans doute les délégués des sections ne refusèrent point, après avoir vérifié leurs pouvoirs et confirmé la Commission des Six, de participer à la réunion plus étendue. C’est probablement l’adhésion préalable et l’investiture officielle des délégués mandatés des sections qui donnaient à la Commission des Six l’assurance révolutionnaire dont Dufourny faisait preuve en son nom dans la réunion plénière. Michelet place la nomination de la Commission des Neuf dans la nuit du 30 au 31 mai. Tout cela est bien flottant. Le plus vraisemblable est qu’à la Commission des Six constituée dès le 25, Dobsent, relâché en même temps que Varlet et Hébert, vint s’ajoindre le 29. Il avait un grand prestige. C’est lui qui avait donné le signal de la résistance, et il était le président tout désigné d’une commission d’exécution.