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une supériorité proportionnelle sur les marchés étrangers. Cet avantage a été surtout visible durant la deuxième partie de la période à laquelle je fais allusion, et il grandit sans cesse en proportion même de la prospérité qu’il contribue à créer.

« En outre, l’esprit d’exploration et d’entreprise de nos marchands s’est manifesté par l’extension de notre navigation et de nos pêcheries, et par l’acquisition de nouveaux débouchés dans différentes parties du monde, et incontestablement ces efforts n’ont pas été peu aidés par les nouvelles relations avec la France, en suite du traité de commerce, relations qui, quoique contrariées et diminuées par les désordres qui sévissent en ce moment dans ce royaume, ont été un grand stimulant de plus pour l’industrie et l’activité de notre pays.

« Mais il y a une autre cause, bien plus satisfaisante encore que toutes les autres, parce qu’elle est d’une nature permanente et toujours plus extensive : c’est la constante accumulation du capital, c’est sa continuelle tendance à croître, tendance dont l’opération est plus ou moins visible, selon qu’elle est ou n’est pas neutralisée par quelque calamité publique ou par une politique maladroite et fâcheuse, mais qui doit toujours se manifester et grandir dans un pays parvenu à un certain degré de prospérité commerciale. Quelque simple, quelque évident que soit le principe de cette croissance, et quoiqu’il ait dû certainement être observé à un degré plus ou moins haut, surtout dans les plus récentes périodes, je doute qu’il ait jamais été expliqué aussi pleinement, aussi suffisamment que dans les écrits d’un auteur de notre temps, qui malheureusement n’est plus (je pense à l’auteur d’un célèbre traité sur la richesse des nations) et qui, par sa connaissance étendue du détail et par la profondeur de ses recherches philosophiques fournit, je crois, la meilleure solution à tous les problèmes de l’histoire du commerce et de l’économie politique. Cette accumulation du capital provient de l’application continuelle d’une partie au moins du profit réalisé chaque année par le capital à l’accroissement du capital lui-même, dont la somme accrue est employée de nouveau de semblable façon et réalise du profit dans les années suivantes. La grande masse de la propriété de la nation s’accroît ainsi d’une manière constante et intérêts composés, et ses progrès, dans une assez longue période, sont tels qu’à première vue ils sont presque incroyables. Si grands qu’aient été jusqu’ici les effets de cette cause, ils seront plus grands encore dans l’avenir, car ses pouvoirs s’augmentent en proportion même qu’ils s’exercent. Elle agit avec une vélocité constamment accélérée, avec une force constamment accrue.

Mobilitate viget, viresque acquirit eundo.

(Elle prend de la vigueur par son mouvement même et acquiert des forces en marchant.)