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au 10 août, je ne puis reconnaître en elle la représentation du peuple. Déjà plusieurs sections de Paris ont réclamé contre sa formation qui n’a pu être légalisée que par l’insurrection ; mais quand tout rentre dans l’ordre, la Commune doit s’y soumettre. Cette assemblée ne se compose que de commissaires qui furent nommés pour se concerter sur les opération relatives au 20 août ; elle s’est, à la suite de cela, érigée de son autorité privée en municipalité ; elle s’est attribuée à elle-même des pouvoirs qui ne lui étaient pas délégués : peut-être a-t-elle eu raison au moment de la crise, mais le danger passé, elle doit se dissoudre et rentrer d’elle-même dans la classe des citoyens. Aujourd’hui, on l’accuse de tout entraver, de tout désorganiser. Elle s’est même permis de suspendre le maire de Paris ; un pareil état ne peut plus être toléré, car il nous conduirait à un bouleversement total. »

Et Choudieu ajoute : « Les circonstances étaient en effet bien difficiles ; les passions populaires encore en effervescence avaient besoin d’être contenues et dirigées ; l’enthousiasme national était une grande force, mais à la condition de ne pas se disperser en mouvements contradictoires, et chaque jour voyait naître, à côté des entraînements les plus généreux, des propositions inconsidérées ou perfides, qu’on présentait sous couleur révolutionnaire. »

L’Assemblée résolut d’en finir : la Gironde, ainsi appuyée et comme couverte par une partie des Montagnards, se crut assez forte pour dissoudre la Commune ; et le même jour, 30 août, l’Assemblée, à la demande de Grangeneuve et sur un bref rapport de Guadet, rendit l’arrêté suivant : « Les sections de Paris nommeront dans le délai de vingt-quatre heures, chacune deux citoyens, lesquels réunis formeront provisoirement et jusqu’à la prochaine élection de la municipalité de Paris, le conseil général de la Commune de Paris. — D’abord après l’élection ordonnée par le précédent article, les commissaires nommés par les quarante-huit sections et qui ont provisoirement remplacé, depuis le 10 août, le conseil général de la Commune, cesseront d’en exercer les fonctions. — Le maire de Paris, le procureur de la Commune, les membres du bureau municipal, et ceux du corps municipal qui était en exercice le 10 août dernier, continueront d’exercer leurs fonctions jusqu’à leur remplacement. »

L’Assemblée ne se bornait pas à dissoudre la Commune. Elle la mettait pour ainsi dire en état d’accusation en adoptant la motion de Cambon qui exigeait la production des titres réguliers des commissaires provisoires.

Je ne sais si la Gironde ne se faisait point quelque illusion. Elle attendait sans doute de tous ces décrets plus qu’ils ne pouvaient lui donner, car c’est à peu près du même esprit révolutionnaire que les nouveaux élus des sections seraient animés. Elle pouvait espérer cependant que la nouvelle Commune, n’étant plus comme animée par la gloire du Dix Août, aurait moins de