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Là, les coups d’Hébert portaient juste. Par Buzot Mme Roland exerçait, en effet, à la Convention une influence détestable.

Dans le no 205, au commencement de janvier 1793, ce sont les ridicules terreurs de Roland, ses perpétuels radotages sur des complots alors inexistants, que le Père Duchesne raille avec une verve basse et comique ; mais quoi ! par la production d’un document inepte où un policier en disponibilité avait fabriqué un plan de complot et tenté de.compromettre Robespierre, Roland n’avait-il pas provoqué ces grossières représailles ?

« No 205 : Les visites de l’an du Père Duchesne, 1er janvier 1793. Et les étrennes bougrement patriotiques qu’il a données à la femme de Coco Roland. Son grand combat avec ce vieux tondu, qu’il a relevé du péché de paresse pour lui apprendre à vivre et l’empêcher de chercher noise aux habitants de Paris ; grand malheur arrivé au tapissier Louvet en voulant tapisser les coins de rues avec un placard couleur de rose contre les sans-culottes.

« La voilà donc finie cette fameuse année qui aurait été la dernière des rois s’il n’avait pas existé un Roland et un Brissot. J’espère que celle qui commence va nous délivrer de tous les jean-foutres qui mettent des bâtons dans les roues et qui retardent le règne de la liberté et de l’égalité. Une nouvelle révolution se mitonne ; l’année 1793 sera la dernière des Rolandins et des Brissotiers. Ils s’y attendent, les bougres, et comme les anguilles de Melun, ils crient avant d’avoir mal. Le ministre Coco ne rêve qu’insurrections et lanternes. Toutes les nuits il est suffoqué plus encore par la peur que par la pituite. Il y a quelques jours, il s’est cru à sa dernière heure. C’est une farce à mourir de rire et dont il faut régaler nos camarades les sans-culottes.

« Il était bien minuit, et la vertueuse Roland, dans les bras de son négrillon Lanthenas, se consolait des plaisirs moraux que lui procure son foutu tondu de mari.

« Grosse d’un discours dont le tapissier devait accoucher le lendemain, elle était dans les douleurs de l’enfantement, lorsque le garçon Louvet entre tout hors d’haleine et vient déranger leurs ébats.

« Ce petit bougre de calibourgnon en sentinelle avait vu commencer l’insurrection. — « L’anarchie, dit-il, est au comble. Ils vont éventrer Louis Capet, éventrer les ministres, les honnêtes membres de la Convention, et châtrer tous nos amis brissotins. » — A ces mots, la bougresse s’évanouit. Son Lanthenas beugle, Louvet court avertir le vertueux Roland. Le bougre se réveille en sursaut, secoue ses longues oreilles. — « Qu’est-ce ? Où sont-ils ? Ma femme, Lanthenas, une circulaire, des courriers, les quatre vingt-quatre départements, mes ordonnances, Brissot, Brissot… Le maire ne m’a pas écrit. Les ministres ne sont pas là, on m’abandonne… Convoquez la Commune, convoquez la Convention… le tocsin, le canon. Mes pantoufles, ma calotte… Aux armes ! Ah ! madame Roland ! Louvet, appelez-la, non laissez-la… Mon discours ne serait pas prêt. Et toi, sentinelle Louvet, à ton