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soumettre la Commune de Paris à une comptabilité envers le peuple et l’opinion publique, veulent faire de ses comptes un labyrinthe de formes judiciaire et chicanières, ceux-là se sont élevés en grand nombre contre l’avis de M. Danton. L’article du Comité a été adopté après une discussion où quelques membres ont mis, puisqu’il faut le dire, et sans néanmoins entendre inculper la majorité de l’assemblée qui est digne de la confiance de la république, plus d’humeur que de raison et plus de cet esprit de modérantisme qui naquit en 89, pour aller former le club des Feuillants, que de véritable patriotisme.


La Marseillaise.
(D’après une estampe de la Bibliothèque Nationale.)


« Au reste, quelque sévérité qu’on veuille mettre à exiger des comptes de la Commune de Paris, on verra aisément, si l’on n’est pas prévenu, que n’ayant point exigé de récépissé de ceux qui sont venus déposer des effets entre ses mains, il sera toujours impossible de la convaincre d’autre délit que de négligence. »

C’était pour la Gironde un avertissement terrible et qui allait au fond même des choses. Condorcet voyait nettement qu’à accuser ainsi les événements de septembre, épisode douloureux et détestable du mouvement révolutionnaire qui avait son origine au Dix-Août, on était logiquement conduit à faire le procès du Dix-Août même et de la République. Les funestes connivences finales de la Gironde et de la contre-révolution, les anathèmes rétrogrades que bientôt, du fond de son cœur ulcéré, Buzot lancera à la République elle-même justifieront l’avertissement et le pressentiment de Condorcet. L’infortuné grand homme, qui avait su s’élever au-dessus des rancunes et des terreurs, mais qui n’y pouvait élever les autres, commençait dès lors à s’épuiser en vains efforts de conciliation et de sagesse. Chose remarquable : à