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le fût, a encore prévu le bon décret que la Convention va rendre. Certes, j’ai été bien surpris d’entendre Fabre, à qui je croyais quelque patriotisme, employer, pour combattre ce décret, les mêmes raisonnements qu’employa l’état-major parisien pour combattre le camp de vingt mille hommes.

« Quoi qu’il en soit, les Marseillais arrivent : ce corps est composé d’hommes entièrement indépendants du côté de la fortune ; chaque homme a reçu de ses père et mère deux pistolets, un sabre, un fusil et un assignat de mille livres. Ils viennent avec un corps de cavalerie de deux cents hommes aider leurs braves frères les Parisiens à assurer le règne de l’égalité et de la fraternité. (Applaudissements prolongés) »

Ainsi la majorité des Jacobins acclamait à ce moment la concentration à Paris des forces révolutionnaires départementales ; elle l’acclamait même quand Barbaroux disait nettement que c’étaient des forces bourgeoises, des fils de famille riches ; et elle ne demandait qu’une chose, c’est que, comme Barbaroux le disait habilement à la fin de son discours, ces patriotes venus de tous les points de la France n’eussent pas d’hostilité systématique contre Paris. La Gironde n’aurait donc pas rencontré d’emblée aux Jacobins un courant d’opposition violente et d’insupportable défiance. Mais elle alla peu aux Jacobins. Elle préférait les conciliabules mystérieux où se nouent les intrigues. Elle espérait que le vide et le silence se feraient peu à peu autour des Jacobins, que les députés ne s’y rendraient guère, les uns parce qu’ils étaient attachés à la politique girondine, les autres parce que les violences de ton et de langage de certains Jacobins, animés de l’esprit impérieux de la Commune, les dégoûteraient.

Réal, président de la séance du 30 septembre, s’y plaint du peu d’assiduité des Conventionnels.

« Pourquoi le nombre des membres de la Convention nationale est-il si petit dans cette assemblée qui devrait les réunir tous ? On parle d’une réunion de députés qui s’assemblent pour se concerter ailleurs que sous les yeux du peuple ; je ne crains pas de le leur dire, ces rassemblements nuisent à la chose publique ; car lorsqu’on veut véritablement le bien du peuple qu’on s’en dit les amis, c’est sous ses yeux que l’on concerte les moyens de lui être utile. »

Et Bourdon répondait : « Je suis bien loin d’approuver la réunion des députés ailleurs que dans cette enceinte ; mais de quelque importance que je croie au salut public de les y voir très assidus, je dois dire à la société que beaucoup de députés en ont été éloignés par le désordre qu’ils ont vu régner dans les premières séances auxquelles ils ont assisté, désordre qui est dû à l’esprit dominateur de certains sociétaires, bons patriotes, mais peu éclairés, qui veulent que leur avis, et rien que leur avis, soit écouté ici, esprit dominateur qui est encore fortifié par quelques habitués des tribunes particulières surtout… Après cela j’espère que tous mes collègues, sentant tous la nécessité