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les baptêmes, mariages, enterrements ou autre cérémonie encourra la destitution ;

« 8o À compter de ce jour également toute espèce de tenture de deuil soit à la porte du défunt, soit à celle du temple, soit même à l’intérieur, sont supprimées ;

« 9o La voie publique appartenant à tous, nul ne peut en disposer pour son avantage particulier ; en conséquence tout conducteur d’enterrements et d’autres cérémonies extérieures d’un culte quelconque ne pourront jamais occuper pour leur cortège qu’un seul côté de la rue, de manière que l’autre reste entièrement libre pour les voitures et pour les citoyens se rendant à leurs affaires ;

« 10o Il sera néanmoins fait une exception à l’article ci-dessus pour les honneurs funèbres rendus aux citoyens morts pour la défense de la liberté ;

« 11o Toute espèce de prérogative ou de privilège étant abolis par la Constitution, nul ne peut avoir, dans un temple, une place distinguée ; en conséquence les œuvres et autres endroits où se plaçaient les marguilliers, fabriciens ou confrères sont supprimés. »

C’est un assez bizarre amalgame. Il est clair que sous le prétexte de maintenir l’égalité, la Commune cherche à réduire de plus en plus le culte. La colère du peuple contre les prêtres réfractaires ne s’était pas étendue encore à tout le christianisme, et la Commune révolutionnaire n’osait pas interdire absolument toute manifestation religieuse, mais elle resserre et elle décolore les processions, les enterrements. Et elle laisse apparaître dans un des considérants sa pensée suprême : substituer la philosophie naturelle et la morale à la religion chrétienne. Elle prélude assez timidement et gauchement à ce que sera dans quelques mois l’hébertisme, et elle dissimule encore sous des apparences de réglementation somptuaire la guerre de fond que dès maintenant elle est décidée à conduire contre l’Église et le christianisme.

Mais parfois toute sa pensée éclate ; comme dans l’arrêté du 17 août : « Le Conseil général, jaloux de servir la chose publique par tous les moyens qui sont en sa puissance, considérant qu’on peut trouver de grandes ressources pour la défense de la patrie dans la foule de tous les simulacres bizarres qui ne doivent leur existence qu’à la fourberie des prêtres et à la bonhomie du peuple, arrête que tous les crucifix, lutrins, anges, diables, séraphins, chérubins de bronze seront employés à faire des canons.

« Les grilles des églises serviront à faire des piques. »

C’est un langage tout nouveau dans la Révolution et qui devait déjà inquiéter Robespierre.

Mais pendant que la Commune qui avait déjà choisi dans son sein un Comité de surveillance, constituait un véritable gouvernement, pendant qu’elle multipliait les mandats d’arrêt contre les suspects, et ouvrait les lettres à la poste, pendant qu’elle ébauchait une politique résolument anti-