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défaite et de l’exil, c’est par une grande irruption de lumière qu’il caractérisait la Convention :

« La Révolution, voici ce que j’en sais : l’Assemblée constituante avait allumé un grand flambeau à côté d’un saint, dans un temple ; la lueur du flambeau faisait voir tous les défauts du saint. À l’Assemblée législative, nous avons renversé le saint. À la Convention nationale il n’est resté bribe ni du saint ni du flambeau, mais nous avons cassé toutes les vitres du temple et le peuple a vu clair de toutes parts, le jour est entré partout. »

Ce sont d’abord des nouvelles heureuses qui arrivèrent à la Convention. L’armée prussienne, arrêtée devant Valmy, hésita un instant et s’affaissa sur elle-même.

Au contraire, Dumouriez et ses soldats étaient pleins d’ardeur et d’élan, Dumouriez ne pouvait savoir toute la profondeur du coup qu’il venait de porter à Valmy ; mais il savait que si l’ennemi se risquait à aller sur Paris, ce serait d’une marche incertaine et d’un esprit découragé. Lui, resté un peu en arrière et à droite, le presserait, l’acculerait vers Paris comme vers un abîme. C’est le plan tracé par Vergniaud. Dumouriez, le 21, communiquait à Servan ses espérances :

« Hier, 20, après une attaque de 8 heures, sur le corps du général Kellermann, campé sur les hauteurs de Valmy, les Prussiens, après avoir beaucoup perdu, ont continué leur marche par ma gauche ; ils sont suivis de la colonne des Hessois et des émigrés, qui passeront devant moi aujourd’hui ; je vais les serrer de près et suivre leurs mouvements, avec l’armée entière qui est très animée. Je ne resterai pas longtemps dans la position que j’occupe, je suivrai les ennemis dans leur marche, si elle est dirigée sur Reims, je les serrerai de près. »

Brunswick sentit le danger ; et il ouvrit des négociations ; mais avec quelle incertitude et quelle maladresse ! Il était trop éclairé pour ne pas comprendre la grandeur et la puissance de la Révolution qu’il combattait. Il aurait donc dû se borner à demander des assurances pour la vie du roi Louis XVI. Mais il était entraîné à les demander aussi pour son pouvoir. Il dit à l’adjudant général Thouvenot, qui négociait l’échange des prisonniers :

« Nos nations ne sont pas faites pour être ennemies ; n’y aurait-il pas quelque moyen de nous arranger à l’amiable ? Nous sommes dans votre pays ; il est désolé par les malheurs inévitables de la guerre. Nous savons que nous n’avons pas le droit d’empêcher une nation de se donner des lois, de tracer son régime intérieur, le sort du roi seul nous occupe ; que deviendra-t-il ? Qu’on nous donne sur lui des assurances, qu’on lui assigne une place dans le nouvel ordre des choses, sous une dénomination quelconque, et S. M. le roi de Prusse rentrera dans ses États et deviendra votre allié. »

Quelles contradictions puériles et quelle lassitude ! Comme il est visible