Page:Jaurès - Histoire socialiste, II.djvu/567

Cette page a été validée par deux contributeurs.

proclame la liberté de toutes les consciences et de tous les esprits ! Elle proclame que nul homme ne pourra être inquiété pour sa croyance ; elle ouvre à toutes les curiosités, à toutes les audaces de l’esprit le grand univers ! Et elle ne rencontrera point partout la sympathie enthousiaste des consciences opprimées, des esprits à demi enchaînés ?

Le serpent et la lime ― Fable
(D’après une estampe du Musée Carnavalet.)


Quoi ! la Révolution proclame les Droits de l’Homme : elle signifie leur dignité à tous les êtres humains ; elle leur rappelle que cette dignité est imprescriptible, que ce droit est inaliénable, que des siècles et des siècles de servitude n’ont pu en abolir les titres, et que les millions d’hommes, serfs des nobles, esclaves des rois, peuvent exercer leur liberté souveraine comme si jamais ils ne l’avaient abdiquée ! Et de partout les asservis ne répondront pas à son appel ? Quoi ! la Révolution a brisé le vieux système féodal ; elle a aboli la dîme, aboli la corvée, aboli le servage, aboli les droits féodaux, et les paysans de Belgique, de Hollande, d’Allemagne, d’Italie, ployés sous le servage, sous la corvée, sous les innombrables droits seigneuriaux ne se redresseront pas au premier appel de la Révolution ? Quoi ! la bourgeoisie industrielle, celle qui produit ou qui dirige la production est appelée pour la première fois à contrôler les affaires publiques,