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agir par des pétitions sur l’Assemblée et sur le roi. La pétition n’était-elle pas légale ?

Mais ces pétitions il fallait les appuyer par une grande démonstration de force. C’est en foule que les citoyens armés iront à l’Assemblée et aux Tuileries. Ils iront le 20 juin, l’anniversaire du serment du Jeu de Paume, pour rappeler à tous la grande journée où l’arbitraire royal se brisa contre la fermeté des représentants.

C’est le 16 juin que Lazowsky et ses compagnons firent part de leur dessein au Conseil général de la Commune. Ce n’est donc pas la lettre de Lafayette, connue seulement deux jours après, qui a donné aux faubourgs l’idée de protester par la manifestation du 20 juin. Mais elle ajouta singulièrement à la colère et à l’élan. Lazowsky et ses amis espéraient obtenir de l’Hôtel de Ville, du Conseil général de la Commune, la permission de manifester. Ainsi, sous le couvert des autorités légales, la force populaire se déploierait sans obstacle, et l’effet de la manifestation serait plus imposant et plus sûr. Il fallait que les délégués des faubourgs eussent déjà une très grande conscience de leur force pour oser demander la permission administrative d’aller en armes à l’Assemblée et aux tribunes.

Le Conseil général de la Commune ne se laissa pas engager aussi avant. Il refusa et prit l’arrêté suivant :

« MM. Lazowsky, capitaine des canonniers du bataillon de Saint-Marcel, Duclos, Pavie, Lebon, Lachapelle, Lejeune, Vasson, citoyens de la section des Quinze-Vingts, Geney, Deliens et Bertrand, citoyens de la section des Gobelins, ont annoncé au Conseil général que les citoyens des faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marcel avaient résolu de présenter mercredi 20 du courant, à l’Assemblée nationale et au roi, des pétitions relatives aux circonstances et de planter ensuite l’arbre de la liberté sur la terrasse des Feuillants, en mémoire de la séance du Jeu de Paume.

« Ils ont demandé que le Conseil général les autorisât à se revêtir des habits qu’ils portaient en 1789, en même temps que de leurs armes. « Le Conseil général, après avoir délibéré sur cette pétition verbale et le procureur de la Commune entendu :

« Considérant que la loi proscrit tout rassemblement armé, s’il ne fait partie de la force publique légalement requise, a arrêté de passer à l’ordre du jour.

« Le Conseil général a ordonné que le présent arrêté serait envoyé au directoire du département et au département de police et qu’il en serait donné communication au corps municipal. »

Cet arrêté est signé du doyen d’âge Lebreton, président, et du jeune secrétaire Royer, qui sera plus tard illustre sous le nom de Royer-Collard. (Voir Mortimer-Terneaux). Il irrita violemment les délégués des faubourgs ; mais ils passèrent outre et ils continuèrent d’ailleurs, pour rassurer, pour