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nisées. Il affirme qu’en haine de Lafayette lui-même, Dumouriez a refusé aux soldats de la patrie et de la Révolution tous les secours d’approvisionnements et d’armes sans lesquels ils ne pouvaient espérer la victoire. Ainsi, tous les partis qui se disputent la maîtrise de la Révolution invoquent le drapeau. Ainsi tous se renvoient le reproche meurtrier de trahison : à Brissot, ami et protecteur de Dumouriez, qui a fait mettre en accusation le feuillant De Lessart, Lafayette répond en accusant de trahison Dumouriez lui même, qui fut jusqu’au 15 juin l’homme de la Gironde.

« C’est, dit Lafayette, après avoir opposé à tous les obstacles, à tous les projets, le courageux et persévérant patriotisme d’une armée, sacrifiée peut-être à des combinaisons contre son chef, que je puis opposer aujourd’hui à cette faction la correspondance d’un ministre, digne produit de son club ; cette correspondance, dont tous les calculs sont faux, les promesses vaines, les renseignements trompeurs ou frivoles, les conseils perfides ou contradictoires, où après m’avoir pressé de m’avancer sans précautions, d’attaquer sans moyens, on commençait à me dire que la résistance allait devenir impossible lorsque mon indignation a repoussé cette lâche assertion. »

Et Lafayette, après avoir flatté son armée et les espérances nationales, conclut que, pour vaincre ses ennemis du dehors, il ne manque à la France qu’une chose : écraser les agitateurs du dedans.

« Ce n’est pas sans doute au milieu de ma brave armée que les sentiments timides sont permis. Patriotisme, énergie, discipline, patience, confiance mutuelle, toutes les vertus civiques et militaires, je les trouve ici (vifs applaudissements d’une grande partie de l’Assemblée). Ici, les principes de liberté et d’égalité sont chéris, les lois respectées, la propriété sacrée : ici l’on ne connaît ni les calomnies ni les factions… Mais pour que nous, soldats de la liberté, combattions avec efficacité, il faut… que les citoyens, ralliés autour de la Constitution soient assurés que les droits qu’elle garantit seront respectés avec une fidélité religieuse qui fera le désespoir de ses ennemis cachés ou publics. »

« Ne repoussez pas ce vœu, c’est celui des amis sincères de votre autorité légitime. Assurés qu’aucune conséquence injuste ne peut découler d’aucun principe pur, qu’aucune mesure tyrannique ne peut servir une cause qui doit sa gloire aux bases sacrées de la liberté et de l’égalité, faites que la justice criminelle reprenne sa marche constitutionnelle ; que l’égalité civile, que la liberté religieuse jouissent de l’entière application des vrais principes.

« Que le pouvoir royal soit intact, car il est garanti par la Constitution ; qu’il soit indépendant, car cette indépendance est un des ressorts de notre liberté ; que le roi soit révéré, car il est investi de la majesté nationale, qu’il puisse choisir un ministère qui ne porte les chaînes d’aucune faction, et s’il