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bien qu’ordonnée par la loi et rendue publique tous les mois dans les comptes de la Caisse de l’extraordinaire n’est pas aussi immédiatement sous les yeux du peuple. »

Ainsi il y avait par là une sorte d’émission quasi occulte d’assignats s’ajoutant à l’émission publique, et ces reconnaissances qui, dans le payement des biens nationaux, étaient admises comme les assignats, faisaient concurrence à ceux-ci, et en diminuant la valeur de leur gage risquaient d’en amoindrir le crédit. Or, c’est sur de gros chiffres que portait cette liquidation, 12.000 offices avaient été supprimés ; les liquidations déjà faites s’élevaient à 318.856.000 livres, et le commissaire liquidateur, Dufresne Saint-Léon évaluait à 800 millions la liquidation totale des offices. De là pouvaient naître obscurément sous forme de reconnaissances provisoires, d’innombrables assignats.

Billet de cinq livres de la Caisse patriotique.
(D’après un document du Musée Carnavalet).


Au demeurant, comme c’est surtout au paiement de la dette exigible que la Révolution, soucieuse avant tout d’éviter la banqueroute, avait destiné les assignats, l’indétermination où était encore la dette exigible elle-même frappait aussi les assignats.

L’habile financier Clavière, qui avait travaillé avec Mirabeau et qui était très dépité de n’avoir pas été élu à l’Assemblée législative, demanda à être admis à la barre pour signaler le péril où cet état incertain de la dette mettait le crédit des assignats. Il affirma avec force que beaucoup de prétendues créances étaient véreuses ou suspectes, qu’une liquidation hâtive et désordonnée consacrait bien des fraudes, et il demanda que la liquidation et le payement de ces créances fussent suspendus jusqu’à ce qu’un examen étendu et profond ait permis de fixer l’ensemble de la dette et d’en vérifier le détail.