duels, un intérêt particulier d’ambition séparé de l’intérêt public, et des moyens de corruption qui pour être différents de ceux du besoin, n’en sont souvent que plus alarmants pour la liberté.
« Mais s’il est vrai que ce n’est pas dans les classes supérieures que se trouvent le plus généralement les trois garanties, il est également vrai que ce n’est pas dans la classe des citoyens qui, obligés immédiatement et sans cesse, par la nullité absolue de leur fortune, de travailler pour leurs besoins, ne peuvent acquérir aucune des lumières nécessaires pour faire les choix, n’ont pas un intérêt assez puissant à la conservation de l’ordre social existant, étant enfin sans cesse aux prises avec le besoin et étant chaque jour, par l’absence d’un moment de travail, réduits aux dernières extrémités, offriraient par là même à la corruption de la richesse un moyen trop facile de s’emparer des élections. C’est donc dans la classe moyenne qu’il faut chercher des électeurs, et je demande à tous ceux qui m’écoutent, si c’est une contribution de 10 journées de travail qui constitue cette classe moyenne, et qui peut assurer à la société un degré certain de sécurité. »
Barnave, découvrant toute sa pensée, déclare qu’il ne redoute pas précisément les prolétaires. Ceux-ci étaient à ce moment trop faibles, trop peu conscients de leur intérêt de classe pour effrayer directement la bourgeoisie possédante.
Ce que Barnave redoute, ce sont, si l’on peut dire, les nouvelles couches bourgeoises, cette bourgeoisie pauvre, avide et ambitieuse qui pour se créer un rôle prolongera la Révolution, agitera les éléments populaires qui sans elle resteraient passifs.
C’est la haine contre Brissot et sa suite, c’est la peur des libellistes qui anime Barnave. Écoutez-le, comme sa parole est âpre ! « Il se glisse cependant dans les assemblées électorales une espèce d’hommes qui n’ont pas les qualités que vos comités voudraient exiger, mais qui est bien loin d’appartenir à cette classe pure d’artisans et d’agriculteurs que je verrais avec autant de plaisir que tout autre dans les assemblées électorales. Parmi les électeurs qui sont choisis sans payer 30 ou 40 journées de travail, ce n’est pas l’ouvrier sans crédit, ce n’est pas le laboureur, ce n’est pas l’artisan honnête et incessamment adonné aux travaux que ces besoins nécessitent qui va exercer la fonction d’électeur, ce sont quelques hommes animés, poussés par l’intrigue, qui vont colportant dans les assemblées primaires la turbulence et le désir de changement dont-ils sont intérieurement dévorés ; ce sont des hommes qui, par la même raison qu’ils n’ont rien et qu’ils ne savent pas trouver dans un travail honnête la subsistance qui leur manque, cherchent à créer un nouvel ordre de choses, qui puisse mettre l’intrigue à la place de la probité, un peu d’esprit à la place du bon sens, et l’intérêt particulier et toujours actif à la place de l’intérêt général et stable de la société. (Vifs applaudissements.)
« Si je voulais appuyer par des exemples la proposition que je viens