voulu leur donner. Or, dans ce cas là les ouvriers ne peuvent faire aucune réclamation pour faire valoir leur droit. Dans cet état de choses, les ouvriers charpentiers et tous les vrais patriotes ont droit d’attendre de la sagesse de l’Assemblée nationale, qu’elle ne protégera pas la coalition des entrepreneurs, laquelle ne tend uniquement qu’à l’oppression ; oppression bien coupable en ce qu’elle prive la patrie de citoyens qui se distingueraient dans l’art de la charpente, si nécessaire au public, s’ils étaient assurés d’y trouver seulement des moyens de subsistance. »
« Au surplus toutes les démarches qu’ils ont faites ne prouvent que leur égoïsme et leur entêtement de leurs anciens privilèges, qu’ils sont ennemis jurés de la Constitution, puisqu’ils méconnaissent les droits de l’homme, qu’ils sont les plus zélés partisans de l’aristocratie la plus outrée et par conséquent ennemis du bien général. »
Il y a certes, dans cette pétition des ouvriers, une grande fermeté d’accent. Ils dénoncent avec vigueur la perpétuelle coalition patronale et ils font éloquemment appel aux Droits de l’homme en faveur des prolétaires. Il est visible que la déclaration des Droits a été interprétée par la classe ouvrière comme une promesse et qu’au symbole de la Révolution le prolétariat a immédiatement attaché son espérance. Mais les conclusions positives des ouvriers sont vagues. Ils sont encore tout à fait novices ; et même en ce qui touche le droit de coalition et de grève, ils paraissent douter de leur droit. Tandis que les « ci-devant maîtres », restés « les maîtres », affirment avec une netteté arrogante qu’il ne doit y avoir aucune entente, que tout concert de salariés en vue de faire hausser les salaires est contraire aux droits de l’homme et aux droits de l’individu, que la concurrence suppose l’isolement et que le contrat de travail doit être débattu et conclu d’individu à individu, tandis qu’ils consacrent ainsi, avec une audace insolente, la primauté des maîtres toujours coalisés de fait, sur les ouvriers dispersés ; les ouvriers n’osent pas répondre clairement qu’ils n’ont d’autre moyen de se défendre et de faire hausser leurs salaires que de se coaliser et de cesser ensemble le travail.
Bien mieux, ils prétendent que les entrepreneurs, quand ils disent que les ouvriers veulent augmenter les salaires par la cessation des travaux leur prêtent des intentions criminelles. Eux-mêmes traitent de crime la grève systématiquement délibérée, c’est-à-dire le seul moyen efficace de lutte et de salut. Et dans les statuts qu’ils rédigent, dans le règlement qu’ils proposent aux maîtres, ils s’interdisent à eux-mêmes d’arrêter le travail quand il sera pressé, c’est-à-dire qu’ils se retirent à eux-mêmes le droit de grève juste dans le moment où la grève peut être victorieuse.
Ils ne se sont pas encore rendu compte que le régime capitaliste et bourgeois où la société allait entrer, était un régime de lutte illimitée et qu’ils avaient à s’armer pour le combat.
Une vague espérance les anime et les exalte ; ils sentent que dans la