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HISTOIRE SOCIALISTE

et chantiers de Paris et ont employé la violence pour en arracher ceux des ouvriers qui y travaillaient paisiblement.

« Les entrepreneurs-charpentiers, alarmés de ces prétentions et de ce désordres, s’étaient empressés de les dénoncer dans les sections dont ils sont membres et ils se disposaient à invoquer l’autorité des lois et le secours de la Municipalité pour les faire réprimer et obtenir justice, lorsqu’ils ont appris par un avis affiché dans toutes les rues, que la Municipalité avait l’intention de mettre fin à des assemblées qui produisaient des effets aussi dangereux pour la Ville de Paris. Mais l’attente de la Municipalité ainsi que les espérances des entrepreneurs ont été trompées. Les ouvriers journaliers persistent avec obstination dans leur système, ils abusent de ce que la situation de plusieurs entrepreneurs de charpente les force à faire le sacrifice imposé, pour continuer les constructions dont ils sont chargés et de se mettre à la discrétion de l’assemblée des ouvriers.

« L’intérêt public, les engagements que les ci-devant maîtres charpentiers ont pris envers les propriétaires avec qui ils ont traité, la crainte de voir à chaque moment augmenter le danger, tout leur fait une loi impérieuse de représenter à la Municipalité qu’il est temps de prendre des mesures efficaces pour détruire la source de tant de désordres qui pèseraient bientôt sur toutes les classes de la société et causeraient des malheurs irréparables.

« Comment, en effet, messieurs, concilier avec les circonstances une augmentation arbitraire sur le prix des ouvrages de charpente ? Est-ce dans le moment où le prix des denrées de toute espèce et surtout de celles de première nécessité doit diminuer considérablement que les ouvriers peuvent faire une pareille demande ? Les entrepreneurs n’ont pas le droit de concourir à disposer ainsi de la fortune des propriétaires et à les priver du bénéfice de la suppression des entrées qu’ils paient en partie d’une autre manière.

« Ils ne doivent point consentir à recevoir des ouvriers du sein d’une assemblée qui leur donnerait et le nombre et l’espèce d’ouvriers qu’elle voudrait à un prix qu’elle fixerait arbitrairement. Qui assurera les entrepreneurs qu’on ne leur donnerait pas des manœuvres pour charpentiers, lorsque cette assemblée pourrait prélever une contribution sur les individus à qui elle procurerait du travail ? Les entrepreneurs qui ont pris des engagements aux prix courants, ou qui sont chargés de constructions par des adjudications au rabais ne peuvent pas supporter cette augmentation. Il en est de même des autres, parce qu’on ne leur tiendrait pas compte de cette augmentation dans le règlement. Une augmentation subite d’un tiers sur le prix de la main-d’œuvre de la charpente est donc impraticable.

« Cependant, la stagnation des ouvrages de charpente va mettre les autres ouvriers du bâtiment dans l’impossibilité de continuer les travaux. Un grand nombre de manœuvres et de maçons vont refluer sur les travaux publics et augmenter cet objet de dépense. On souffrira encore par la même