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HISTOIRE SOCIALISTE

soit porté atteinte à la liberté de l’émigration, ses adversaires essayent de l’accabler aux Jacobins : et ils lui portent un rude coup. Or, à travers tous ces déchirements, Robespierre chemine, avec son inflexible idéal de démocratie. Mais que pouvait-il, et comment aurait-il pu conduire la Révolution jusqu’à l’entière formule démocratique, si la résistance du roi à la Révolution n’avait déterminé des secousses tragiques ? Aussi Robespierre avec une prudence extrême et un grand sens de la réalité, ne sortait-il jamais des limites constitutionnelles. Même quand il était vaincu (et il l’était le plus souvent), même quand il n’avait pu faire attribuer à la nation seule le droit de déclarer la guerre, même quand il n’avait pu étendre à tous les citoyens le droit de suffrage, même quand il n’avait pu obtenir le licenciement des officiers ou un régime colonial conforme à la justice, toujours il s’inclinait avec un respect qui, à cette date au moins, n’est pas simulé. Camille Desmoulins lui ayant prêté, à propos du vote de l’Assemblée sur le droit de paix ou de guerre des paroles assez vives, il rectifie aussitôt, protestant de son respect de législateur pour les décisions légales, même quand elles sont contraires à ses vues.

Et les Jacobins où son influence commence à grandir sont avant tout « les amis », les défenseurs de la Constitution. Si la royauté avait suivi les conseils de génie que lui donnait Mirabeau, si Louis XVI avait désarmé la défiance de la nation par une adhésion sans réserve aux principes essentiels de la Révolution, et par la pratique manifestement loyale de la Constitution, Robespierre n’aurait été, dans la Révolution, qu’un puissant doctrinaire de la démocratie. Il en aurait sans cesse rappelé le principe : il aurait peut-être empêché la Constitution de trop incliner à une oligarchie bourgeoise. Mais il n’aurait pas dirigé les événements et réalisé pleinement sa formule. Seules, la lente croissance économique du prolétariat industriel, la lente diffusion de lumière dans le peuple auraient transformé peu à peu la Révolution en démocratie.

La Constituante fut cruellement troublée par les incidents militaires de Metz, de Nancy et de Brest. En août 1790, l’effervescence était grande parmi les soldats de Metz ; les officiers avaient pris sous l’ancien régime l’habitude de considérer que le soldat n’avait pas de droit ; et, par dédain, autant au moins que par rapacité, ils volaient littéralement une partie des fonds destinés au soldat. À Metz, la chose fut démontrée : les soldats, nommant des délégués par compagnie, demandèrent une vérification des comptes et il fallut bien reconnaître qu’ils étaient irréguliers. Un contrôle plus sérieux fut établi. Mais, au même moment, des troubles graves éclataient parmi les troupes de Nancy.

Un conflit politique aigu et presque permanent existait depuis la Révolution entre les officiers et les soldats du régiment de Chateauvieux alors en garnison à Nancy. Les officiers étaient aristocrates ; les soldats étaient révolutionnaires ; le régiment qui était à Paris le 14 juillet 1789 avait signifié très