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HISTOIRE SOCIALISTE

Même quand ils seraient tous sortis de l’élection populaire, l’esprit d’Église pouvait enfin l’emporter en eux sur l’esprit de la Révolution et rien n’assurait qu’ils ne fissent pas obstacle à la Constitution même dont ils seraient émanés. Aussi, cinq mois à peine après la promulgation du décret sur la constitution civile du clergé, l’Assemblée le compléta le 14 novembre 1790 en précisant les dispositions légales qui briseraient la résistance arbitraire des évêques métropolitains.

Elle organisa toute une procédure de confirmation épiscopale qui aboutit enfin au tribunal de cassation, et par lui, c’est la société civile, devenue à elle-même son pape, qui va disposer, en fait, du pouvoir de confirmation. « Si le métropolitain ou, à son défaut, le plus ancien évêque de l’arrondissement, refuse de lui accorder la confirmation canonique, l’élu se représentera à lui assisté de deux notaires ; il le requerra de lui accorder la confirmation canonique et se fera donner acte de la réponse et de son refus de répondre. — Si le métropolitain ou le plus ancien évêque de l’arrondissement persiste dans son premier refus, l’élu se présentera en personne, ou par son fondé de procuration, et successivement chez tous les évêques de l’arrondissement, chacun suivant l’ordre de leur ancienneté, toujours assisté de deux notaires ; il leur exhibera le procès-verbal ou les procès-verbaux des refus qu’il aura essuyés, et il les suppliera de lui accorder la confirmation canonique. — Au cas qu’il ne se trouve dans l’arrondissement aucun évêque qui veuille accorder à l’élu la confirmation canonique, il y aura lieu à l’appel comme d’abus. — L’appel comme d’abus sera porté au tribunal de cassation. — L’élu sera tenu d’interjeter son appel comme d’abus, au plus tard, dans le délai d’un mois, à compter de la date du procès-verbal qui constatera le refus des évêques de l’arrondissement, et de le faire juger dans le mois suivant, à peine de déchéance. — Il ne sera intimé sur l’appel comme d’abus d’autre partie que le commissaire du roi près le tribunal de cassation et cependant l’évêque métropolitain dont le refus aura donné lieu à l’appel comme d’abus, aura la faculté d’intervenir sur l’appel pour justifier son refus, mais sans que son intervention puisse en aucun cas retarder le jugement de l’appel, ni qu’il puisse former opposition au jugement qui serait intervenu, sous prétexte qu’il n’y aurait pas été partie. — Si le tribunal de cassation déclare qu’il n’y a pas abus dans le refus il condamnera l’appelant en une amende de 150 livres et ordonnera que son jugement sera, à la requête du commissaire du roi, signifié au procureur général syndic du département, pour convoquer incessamment l’assemblée électorale à l’effet de procéder à une nouvelle élection de l’évêque. — Si le tribunal déclare qu’il y a abus dans le refus, il enverra l’élu en possession du temporel et nommera l’évêque auquel il sera tenu de se présenter pour le supplier de lui accorder la confirmation canonique. — Lorsque, sur le refus du métropolitain et des autres évêques de l’arrondissement, l’élu aura été obligé de se retirer devers un évêque d’un