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HISTOIRE SOCIALISTE

ce que dit l’historien. Si elle avait voulu seulement ôter leur caractère légal aux corporations religieuses, elle n’eût pas prononcé l’interdiction des congrégations qui recevraient des vœux perpétuels, elle n’aurait pas saisi le bien des communautés.

Si des associations avaient recueilli des hommes faisant vœu de servitude, l’Assemblée n’aurait pas jugé suffisant de ne plus consacrer par la loi ce vœu inhumain, elle aurait dissous l’association qui acceptait que des hommes se dévouent à l’esclavage. C’est ainsi que la Constituante traita les congrégations religieuses, et lorsque plus tard, quelques jours après le 10 août, la Législative rendra le décret suivant : « A dater du 1er octobre prochain, toutes les maisons encore actuellement occupées par des religieuses ou par des religieux seront évacuées par lesdits religieux et religieuses, et seront mises en vente à la diligence des corps administratifs », c’est bien l’extinction de la vie monacale qui est prononcée, mais c’est l’application énergique du principe posé par les Constituants.

En ce qui touche l’organisation générale de l’Église, la Constituante intervint pour faire entrer l’Église dans les cadres administratifs tracés par la Révolution. Les archevêchés et évêchés avaient, sous l’ancien régime, l’étendue la plus variable. La Constituante fit de chaque département un diocèse : « Chaque département, dit l’article 1er, formera un seul diocèse qui aura la même étendue et les mêmes limites que le département. » Il y eut ainsi 83 évêchés dont la Constituante fixa elle-même les chefs-lieux. Elle divisa en outre le royaume en dix arrondissements métropolitains, plusieurs évêchés étaient naturellement rattachés à une même métropole.

Les évêques diocésains étaient placés sous l’autorité de l’évêque métropolitain et c’étaient là les seules autorités ecclésiastiques reconnues par la loi. Toute dépendance envers des sièges ecclésiastiques établis au dehors était formellement abolie. L’article 5 disait : « Il est défendu à toute église ou paroisse de France, et à tout citoyen français, de reconnaître en aucun cas et sous quelque prétexte que ce soit, l’autorité d’un évêque ordinaire ou métropolitain dont le siège serait établi sous la domination d’une puissance étrangère ni celle de ses délégués résidant en France ou ailleurs, le tout sans préjudice de l’unité de la foi et de la communion qui sera entretenue avec le chef visible de l’Église universelle. »

L’article 6 précisait les rapports des évêques diocésains et des évêques métropolitains : « Lorsque l’évêque diocésain aura prononcé dans son synode sur des matières de sa compétence, il y aura lieu au recours au métropolitain, lequel prononcera dans le synode métropolitain. »

Mais il ne suffisait pas de remanier les circonscriptions de diocèse ; les paroisses aussi étaient bizarrement découpées, avec des étendues beaucoup trop inégales et, par suite, les traitements ou émoluments auraient été beaucoup trop inégaux. La Constituante ayant assumé la charge financière du