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HISTOIRE SOCIALISTE

appellera plus tard « les plus fort imposés » : pour être notable comme pour être membre du corps municipal, il fallait payer dix journées de travail.

Telle quelle, cette législation donne aux municipalités un pouvoir administratif énorme. Malgré la tutelle des corps administratifs du département, électifs d’ailleurs eux aussi, les corps municipaux auront une grande force d’action.

LA VIE MUNICIPALE.

J’ai souligné les articles qui leur remettaient une part directe de la souveraineté nationale, notamment la perception de l’impôt d’État et la direction des travaux publics dans les limites de la commune. Ce pouvoir est si grand qu’il suppose une harmonie presque complète des forces locales et du pouvoir central.

Les municipalités hostiles peuvent, par exemple, contrarier ou tout au moins retarder la levée de l’impôt : et plus d’une fois la Révolution aura à souffrir du mauvais vouloir des autorités locales. Mais dans l’ensemble elle a beaucoup gagné à témoigner aussi hardiment sa confiance et à éveiller partout les initiatives.

Les communes ainsi largement dotées de liberté, aideront notamment la Révolution dans la vente des biens nationaux avec un zèle admirable qui sauvera la France révolutionnaire.

J’avais omis de dire que les corps municipaux étaient élus pour deux ans et renouvelables par moitié chaque année : l’intervention des citoyens actifs dans la marche de la commune était ainsi très fréquente.

Il y eut plus d’une fois conflit entre les municipalités et les Directoires des départements. D’abord il est inévitable que des difficultés se produisent entre contrôleurs et contrôlés. Mais surtout les municipalités eurent souvent un caractère plus révolutionnaire et plus populaire. Les membres de l’assemblée administrative du département ne recevaient aucune indemnité : Seuls ceux du directoire du département, dont les fonctions étaient permanentes, étaient rémunérés.

Les administrateurs étaient donc tenus de passer un mois tous les ans, à leurs frais, au chef-lieu du département : ils ne pouvaient donc être pris que parmi les personnes riches ou tout au moins très aisées.

Au contraire, l’exercice des fonctions municipales n’entraînait point de dépenses et des hommes de condition plus modeste pouvaient y être appelés. De plus, le suffrage, pour les élections municipales était direct : le suffrage pour les assemblées administratives du département et du district était à deux degrés : L’action du peuple était donc plus immédiate sur les élus municipaux.

Ceux-ci d’ailleurs restaient dans la dépendance des assemblées