Page:Jaurès - Histoire socialiste, I.djvu/217

Cette page a été validée par deux contributeurs.
207
HISTOIRE SOCIALISTE

quelles il n’a aucun droit, même apparent, ne résidant pas d’ailleurs à Warlaing, ni seigneur desdits marais. »

Les habitants du village de Dury, dont nous avons déjà vu les réclamations pour la vaine pâture, demandent « que les marais et lieux communaux dont ladite communauté jouissait depuis 1242 pour leurs chauffes et pâturages de leurs bestiaux, qui leur procuraient des élèves en chevaux et vaches, leur soient remis par le seigneur marquis de la Réauderie, qui s’en est emparé totalement sans titre ni qualité, dans lequel marais il fait maintenant extraire de la tourbe à son profit et a fait planter les autres biens communaux, en sorte que lesdits habitants sont totalement privés des avantages qu’ils avaient coutume de retirer de ces biens… » C’est l’impudente expropriétation du paysan. Et, chose inouïe ! même quand les habitants d’une paroisse, entrant dans les voies de l’agriculture progressive, faisaient des dépenses pour améliorer le fond communal, ils étaient spoliés par le seigneur.

Ainsi, dans la communauté d’Éterpigny, du bailliage de Douai, les habitants demandent : « 1o la restitution et conservation des communes, landes ou pâturages, à la communauté, pour en faire un commun lot ; outre le tiers que le seigneur a retiré dans les marais de la communauté, il s’est emparé et a envahi la plupart du restant, de sorte que les habitants, tant à la présente communauté que les voisines, après avoir exposé environ 20,000 florins pour le dessèchement de leurs deux tiers, se sont vus réduits à perdre le fruit de leurs espérances, ces deux tires étant presque engloutis dans les propriétés du seigneur, de sorte que maintenant les communautés à qui appartenaient ces deux tiers sont réduites dans la plus affreuse misère : presque plus de bestiaux, plus de chauffage, chose dont la communauté est dépourvue et qui forme le principal objet du bonheur des habitants des campagnes. »

Le Tiers-État du bailliage d’Évreux est évidemment partagé entre les théories des agronomes ou l’intérêt de la propriété bourgeoise et les vieux des campagnes : « Que les États-Généraux délibèrent s’il est plus avantageux de conserver les biens communaux en état de commun, que d’en provoquer le partage ». Le Tiers État du Forez demande que le partage des biens communaux soit autorisé par une loi générale.

Dans le pays de Gex, il y a à la fois rencontre et opposition de la noblesse et du Tiers-État. La noblesse « demande, pour le plus grand avantage de l’agriculture et du bien public, que le partage des biens communaux à chaque lieu soit fait avec égalité entre les différents propriétaires qui contribuent aux charges royales et locales, sans autre distinction au profit des seigneurs ou autres que les parts qu’ils justifieront leur appartenir par leur inféodation, concession ou titres probants, conformément à l’édit de Savoie du 21 août 1509. » Sur ce point le Tiers-État est muet : évidemment, il est pour le statu quo. Mais où la noblesse et le Tiers-État s’accordent, c’est pour demander que les carrières de pierre dont le fermier du domaine royal s’est emparé fassent